1919, circulaire du 10 septembre

10 septembre 1919. France, 1ere Guerre mondiale, législation.

            Circulaire sur l’interdiction absolue aux familles et aux entrepreneurs de transporter les corps des défunts Morts pour la France sans autorisation.

            « Le, ministre de l’Intérieur, à MM. les Préfets des départements non compris dans l’ancienne zone des opérations militaires.

            J’ai l’honneur de vous transmettre sous ce pli copie d’une circulaire que j’adresse ce même jour à vos collègues de l’ancienne zone des armées, en vue d’empêcher les exhumations de corps des militaires inhumés dans cette zone et leur transport dans d’autres départements.

            Cette circulaire contient deux dispositions dont l’application s’impose sur tout le territoire. 

            La première vise la délivrance qui a été faite à tort par certains de vos collègues d’autorisations de transports pour des corps de civils et même de militaires inhumés dans la zone des armées.

            La seconde concerne le rôle assigné aux bureaux d’octroi qui doivent étendre leur surveillance sur les convois transportant des cercueils.

            Vous voudrez bien donner aux services de votre préfecture et des mairies des instructions pour que les dispositions dont il s’agit soient strictement appliquées dans votre département.

 

            Le Sous-secrétaire d’Etat

            ALBERT FAVRE

 

            Le ministre de l’Intérieur, à MM. les Préfets des départements compris dans l’ancienne zone des opérations militaires.

            Les 27 février et 7 juin derniers, je vous ai adressé deux circulaires tendant :

            La première à interdire les exhumations et les transports de corps de militaires inhumés dans l’ancienne zone des armées,

            La seconde à signaler au sous-secrétariat d’Etat de l’administration au ministère de la Guerre les inhumations qui viendraient à être faites, dans les communes de l’intérieur, des corps de militaires ramenés en fraude de la zone sus-visée.

            Mes instructions ont été sérieusement suivies et leur application a donné des résultats appréciables puisqu’elle a permis de découvrir et de poursuivre certains entrepreneurs d’exhumations et de transports clandestins. Mais l’action des pouvoirs publics ne saurait se borner à réprimer des agissements aussi regrettables qui sont susceptibles, en créant des inégalités choquantes, d’impressionner fâcheusement l’opinion publique. Les procès-verbaux dressés contre des délinquants établissent que la plupart du temps ils ont pu effectuer leurs opérations à votre insu ou en abusant de votre bonne foi et de celle des magistrats municipaux.

            Il convient donc d’entourer des plus sérieuses précautions la délivrance des permis d’exhumation et de transport et de prendre des mesures pour empêcher l’acheminement des corps des militaires à leur nouvelle destination dès que la fraude aura été découverte, et même en cours de route. Les dispositions qui m’ont paru s’imposer à ce triple point de vue sont les suivantes :

        A. - Permis d’exhumation. - Il est bien entendu que mes instructions précitées des 27 février et 7 juin 1919, confirmées par l’Instruction provisoire signée du Président du Conseil, ministre de la Guerre, en date du 15 juin de la même année, continuent à être en vigueur ; par suite, les maires ne peuvent autoriser aucune exhumation de corps de militaire dans l’ancienne zone des armées et ils ont même le devoir de s’y opposer.

            Pour éviter les erreurs à cet égard ils devront exiger que toute demande d’exhumation soit faite par écrit et indique expressément s’il s’agit d’un militaire ou d’un civil, de leur côté, ils feront suivre, dans les permis qu’ils délivreront, les nom et prénoms de la personne à exhumer, de la mention : civil. Cette précaution a un autre avantage : elle permet de poursuivre devant les tribunaux l’auteur de la demande en cas de fausse déclaration de sa part.

            En outre, Les maires auront à s’assurer que l’autorisation de transport qui leur est généralement présentée à l’appui de la demande d’exhumation, spécifie bien qu’il s’agit d’un civil et non d’un militaire ; au cas où cette indication ferait défaut ils devront interdire l’exhumation

            Ils auront soin, enfin, de vérifier si l’autorisation de transport émane du préfet de leur département. Il arrive fréquemment en effet que, pour donner à leurs opérations des apparences de régularité, les entrepreneurs se munissent d’une autorisation signée du préfet du département où le corps va être transporté on encore de celui qu’il doit traverser pour se rendre à destination. Cette pièce n’est pas valable et les maires ne devront pas perdre de vue que seul est compétent pour délivrer le cas échéant une autorisation de transport le préfet du département où le décès a eu lieu, en l’espèce celui où le corps du militaire est inhumé.

        B. - Autorisation de transports. - De même que les maires ne peuvent accorder aucun permis d’exhumation de corps de militaire dans l’ancienne zone des armées, de même vous devez refuser toute autorisation pour le transport de ce corps, par quelque voie ou moyen que ce soit.

            De plus, pour les raisons exposées plus haut, vous tiendrez la main à ce que les demandes de transport de corps dont vous serez saisi précisent, sous la signature de leurs auteurs, qu’il s’agit du corps d’un civil et non d’un militaire. Cette indication devra être reproduite dans les autorisations que vous aurez à délivrer.

            D’autre part, pour faciliter votre tâche, je rappelle aux préfets de la zone de l’intérieur qu’ils n’ont pas qualité pour accorder des autorisations de transport dans leur département quand ces autorisations s’appliquent à des civils et à fortiori à des militaires inhumés dans la zone des armées.

        C. - Mesures à prendre en vue d’empêcher l’acheminement à sa nouvelle destination du corps du militaire transporté en fraude. - Il est à craindre que malgré les pénalités qu’ils encourent des entrepreneurs ne persistent dans leurs coupables agissements et que, déjouant votre vigilance et celle des maires, ils ne parviennent à procéder à des exhumations de militaires dans l’ancienne zone des armées et à placer les corps dans des automobiles pour être transportés dans un autre département.

            J’ai décidé que tout véhicule contenant un corps de militaire, exhumé contrairement à la réglementation en vigueur, qui sera découvert avant d’avoir atteint le terme de son voyage ne pourra pas continuer sa route ,et que procès-verbal sera dressé contre l’entrepreneur du transport. De plus celui ci devra ramener le corps à l’endroit où il a été pris : toutefois cette dernière mesure ne sera pas appliquée lorsque le convoi sera déjà arrivé au lieu de destination ou s’en trouvera à peu de distance.

            Les résultats que nous envisageons ne peuvent être atteints qu’avec le concours de tous les agents où auxiliaires de la force publique.

            Dans ces conditions je vous prie de demander aux maires de votre département d’inviter les bureaux d’octroi à ne laisser pénétrer, sauf l’exception prévue plus haut, sur le territoire de la commune aucun cercueil si le conducteur du convoi ne peut présenter le permis d’exhumation et l’autorisation de transport délivrés dans les conditions réglementaires et à le retenir jusqu’à l’arrivée des services de police.

            Les mêmes obligations s’imposent aux bureaux d’octroi de la zone de l’intérieur et une circulaire sera adressée en ce sens à vos collègues.

            Vous recevrez incessamment de la Direction de la Sûreté générale les instructions en ce qui concerne la surveillance qui doit être exercée à cet égard par les gardes champêtres et les commissaires spéciaux de police sur tout le territoire.

            De son côté, le ministère de la Guerre nous prêtera le concours des services de gendarmerie.

            Je compte sur vous pour que ces instructions soient strictement observées. Je n’hésiterai pas à prendre des sanctions administratives contre les magistrats municipaux qui auraient autorisé, par négligence ou facilité par complaisance, les exhumations ou transports de corps dont il s’agit.

            La présente circulaire s’applique également aux cimetières britanniques et aux tombes des militaires britanniques inhumés dans les cimetières français. Toute demande d’exhumation ou de transport de corps doit donc être rejetée, à moins qu’elle ne vous ait été présentée par l’intermédiaire de la commission impériale des sépultures militaires.

            Par contre elle ne concerne pas les civils inhumés dans la zone des armées, l’instruction provisoire du 15 juin 1919 a abrogé en effet dans son dernier paragraphe les restrictions édictées par la circulaire du 2 octobre 1917 en ce qui concerne les exhumations et des transports de corps de civils. »

 

Le sous-secrétaire d’Etat

ALBERT FAVRE.

 



28/06/2013
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