Histoire du Christianisme. Avant propos (NDL)

Avant propos.

Luce Piétri).

 

« Rompant avec les divers modes de datation durablement en usage dans l’Antiquité, un moine d’origine scythe, Denys le Petit, établit à la demande de son évêque en 525, mais sans succès dans l’immédiat, un comput général nouveau partant de l’année de l’incarnation, qui correspond, d’après ses calculs, à l’an 754 suivant la fondation de Rome. Cette nouvelle ère, appelée à s’imposer au Moyen Âge à tout l’Occident, sanctionne une conception déjà présente chez les premiers chrétiens, celle du temps comme déroulement du plan de Dieu sur le monde, dans lequel la Passion de son Fils fait homme constitue l’événement central d’une histoire du Soleil. »

 

Mais en fait à l’époque, la mort de Jésus considéré comme un obscur agitateur dans le monde juif était passée inaperçue. Il faudra attendre la conversion de l’empereur Constantin au IVe siècle et l’adoption du christianisme comme religion officielle de l’Empire pour que cela constitue une immense révolution.

 

« D’autre part, au sein même de l’Eglise naissante qui affirmait sa vocation à l’universalité, le message évangélique était l’objet d’interprétations divergentes qui, tels la gnose, le marcionisme ou le montanisme, mettaient en péril l’unité de la foi. »

 

Introduction. Jésus de Nazareth (Daniel Marguerat)

 

Quand débuter une histoire du christianisme ? Deux faits contradictoires doivent être pris en considération.

 

  • On ne peut parler de « christianisme » avant le développement d’une prédication centrée sur la personne de Jésus. « Or ces conditions ne sont réunies qu’après l’annonce de la résurrection du Christ. Pâques marque le changement de statut du nazaréen, qui, dé propagateur d’un message devient l’objet de prédication : c’est à cette date que l’on peut faire remonter la naissance du christianisme. »

 

  • Maïs d’un autre côté, « la foi chrétienne vit d’une référence obligée à l’homme de Nazareth. Il serait peu sensé d’occulter cette histoire originaire. »

 

I. Reconstruire la biographie de Jésus. Une tâche possible ?

 

1). Les sources documentaires.

 

Les sources romaines.

 

  • Vers 116/117 Tacite évoque dans ses annales, l’incendie de Rome. Il est ambivalent à l’égard des Chrétiens car il partage la haine que voue le peuple à ceux qu’anime « la haine de la race humaine ». Mais il condamne la manière dont Néron, soupçonné d’être l’auteur de l’incendie, cherche à se disculper du soupçon.

 

  • Vers 111 Pline le Jeune parle de la vénération des chrétiens de Bythinie pour Christus .

 

  • Vers 121 Suétone justifie l’expulsion des Juifs de Rome sous le règne de Claude « comme les Juifs se soulevaient continuellement à l’instigation d’un certain Christos, il les chassa de Rome.

  • Vers 169/170 le rhéteur Lucien de Samosate parle de « ce grand homme qui a été empalé en Palestine pour avoir introduit dans le monde une célébration religieuse nouvelle. » (De morte peregrini). Il parle aussi de Jésus comme d’un « sophiste » dont les chrétiens de son temps suivent encore « les lois ».

 

Les sources juives.

 

  • La Michna, compilation de l’enseignement des sages d’Israël pour les deux premiers siècles de l’ère chrétienne, ne contient aucune mention de Jésus.

 

  • Le Talmud de Jérusalem et le Talmud de Babylone présentent quelques notations polémiques à l’encontre de Jésus (en particulier mise en doute de la naissance virginale).

 

  • « Dans l’ensemble, le mutisme des rabbins sur Jésus s’explique par le conflit très tôt envenimé entre Juifs et Chrétiens. »

 

  • Chez Flavius Josèphe, dans les Antiquités juives (93/94), deux mentions :

 

      • Une mention qui présente Jacques comme « frère de Jésus appelé le Christ. »

 

    • Une mention plus longue. « Vers le même temps vint Jésus, homme sage, si toutefois il faut l’appeler homme. Car il était un faiseur de miracles et le maître des hommes qui reçoivent avec joie la vérité. Et il attira à lui beaucoup de Grecs. C’était le Christ. Et lorsque sur la dénonciation de nos premiers citoyens, Pilate l’eut condamné à la crucifixion, ceux qui l’avaient d’abord chéri ne cessèrent pas de le faire, car il leur apparut trois jours après avoir ressuscité, alors que les prophètes divins avaient annoncé cela et mille merveilles à son sujet. Et le groupe appelé après lui chrétiens n’a pas encore disparu. »

Mais certains passages ont pu être ajoutés par la suite par des copistes chrétiens.

 

Mais le texte de Flavius Josephe confirme « plusieurs données biographiques essentielles : le lien avec Pilate, la nature du supplice, l’activité thaumaturgie, l’enseignement, le rassemblement d’adeptes autour de Jésus, ainsi que le rôle joué dans sa condamnation par les notables juifs.

 

Le nouveau testament.

 

Première attestation par l’apôtre Paul entre 50 et 58. Mais peu de références à part sa mort en croix et sa résurrection.

 

Deuxième source, un recueil de sentences de Jésus, la source des logia, document aujourd’hui perdu. Dans les années 50/60, il rassemble en Palestine une série « de dits que Jésus énonce en Maître de sagesse sous l’horizon du royaume de Dieu. »

 

Troisième source composée des trois plus anciens évangiles, appelés synoptiques :

 

  • Evangile de Marc (vers 65) intègre pour la première fois l’enseignent de Jésus au récit de sa vie. Il aurait recueilli le témoignage direct de Pierre.

 

  • Evangiles de Matthieu et de Luc vers 70/85. Ils ont connu l’évangile de Marc.

 

  • Evangile de Jean, oeuvre plus tardive vers 90. « Sur plusieurs points, il nous livre des données précieuses (durée du ministère de Jésus, date de sa mort).

 

La littérature chrétienne extra-canonique.

 

Il s’agit d’une masse d’écrits qui vont du IIe au VIe siècle et dont le point commun est de ne pas avoir été retenus par l’Eglise, au moment où celle-ci arrêtait le canon de ses écritures normatives.

 

Parmi les plus importants se trouvent :

 

  • Evangile de Pierre entre 100 et 150.

 

  • Evangile de Thomas vers 170

 

  • Protoévangile de Jacques (150-200)

 

Possibilité et limites de la reconstruction historique.

 

En ce qui concerne le Jésus historique, nous disposons d’une grande abondance d’informations aussi bien par la diversité d’origine mais aussi la précocité de l’information (environ 20 ans après sa mort pour les plus anciens). Aucun personnage de l’Antiquité ne bénéficie d’une documentation aussi riche.

 

Mais comme la majeure partie de ces sources est d’origine chrétienne, il peut y avoir des soupçons de subjectivité et de penchant hagiographique.

 

« En résumé, les sources chrétiennes font mémoire de l’histoire passée de Jésus et de ses disciples en vertu de la potentialité qu’à cette histoire de régir la vie des croyants (…) Mais nul ne peut, avec une garantie suffisante, situer dans l’espace et dans le temps la plus grande part des paroles et des gestes attribués à Jésus. »

 

2) Les critères d’authenticité.

 

Pour remonter « aux strates les plus anciennes de la tradition de Jésus, les chercheurs usent de quatre critères principaux et deux secondaires. Aucun ne doit être appliqué exclusivement : la présomption d’authenticité requiert l’usage conjugué de plusieurs. »

 

  • critère d’attestation multiple. Sont réputés authentiques les faits et gestes de Jésus attestés par au moins deux sources littérairement indépendante l’une de l’autre.

 

  • critère de l’embarras ecclésiastique. Sont retenus les paroles aux actes de Jésus qui ont créé difficulté dans leur application au sein des premières communautés chrétiennes.

 

  • Critère d’originalité : une tradition peut être considérée comme authentique à condition de n’être pas la pure reprise d’un motif présent dans le judaïsme de l’époque, où l’effet d’une relecture chrétienne d’après Pâques.

 

  • Critère de plausibilité historique qui doit s’articuler au précédent pour en corriger les effets pervers. Il faut retenir ce qui est plausible dans le cadre du judaïsme palestinien au temps de Jésus (plausibilité en amont), mais aussi ce qui explique l’évolution de la tradition de Jésus après Pâques (plausibilité en aval).

 

  • Critère de cohérence qui postule que Jésus ne fut pas un être absurde ou contradictoire, une logique doit donc être recherchée entre ses paroles et ses gestes, ainsi qu’à l’intérieur de son discours.

 

  • Une logique de crise qui postule que toute reconstruction de la vie du nazaréen doit faire apparaître pourquoi, et sur quels points, a pu se déclencher le conflit mortel qui a opposé Jésus aux leaders religieux d’Israel.

 

II. Le cadre historique et géographique de la vie de Jésus.

 

1). Situation politique de la Palestine au Ier siècle.

 

Contrôle de la Palestine par les Romains à partir de 63 av J-C. A partir de ce moment-là l’histoire de la Palestine est entièrement dominée par Rome, Pompée mettant fin au pouvoir de la dynastie juive des Asmonéens « dont la rébellion conduite par Judas Maccabée (-166 - 160) avait chassé le roi Séleucide Antiochus IV Epiphane qui voulait helléniser de force le pays. »

 

Rome confie l’ensemble de la Palestine à Hérode-le-Grand qui reçoit en 40 av J-C le titre de roi de Judée sous réserve de conquérir militairement son royaume, ce qu’il fait en 37 av J-C. Son règne dure jusqu’en 4 av J-C.

 

A la mort d’Hérode, Auguste ratifie son testament qui partage son royaume entre ses trois fils :

 

  • Archelous reçoit le titre d’ethnarque et l’autorité sur la Judée, la Samarie et l’Idumée.

 

  • Hérode Antipas devient tétraque de Galilée et de Pérée.

 

  • Philippe administre les territoires essentiellement non juifs du Nord-est (Batanée, Gaulanitide, Trachonitide et Auranitide.

 

En 6, Auguste dépose Archelous pour incompétence et l’exile en Gaule (Vienne). La Judée et la Samarie deviennent alors des provinces sénatoriales dont le préfet siège à Césarée Maritime. C’est à cette occasion que sera effectué le recensement de la population sous l’autorité de Quirinus et du procurateur de Judée Coponius.

 

Hérode Antipas pour sa part gouverne jusqu’en 39 avant d’être exilé par Caligula à Lyon.

 

« Ainsi durant la jeunesse et l’activité publique de Jésus, Galilée et Judée connaissaient deux régimes différents. La première fait partie d’un royaume allié avec une administration juive sous tutelle romaine ; la seconde vit un régie d’occupation assuré par un préfet aux ordres de l’empereur. »

 

 

 

 

 

2). Naissance et mort de Jésus : la datation.

 

« Dater avec précision la naissance de Jésus est une entreprise qui dépasse la documentation à notre disposition. Notre unique information provient des évangiles qui cumulent sur cet évènement deux dates incompatibles. »

 

  • Le règne du roi Hérode-le-Grand mort en 4 av J-C.

 

  • L’édit de recensement de Quirinus gouverneur de Syrie qui date de 6.

 

Autre repère chronologique, l’an 15 de Tibère pour la vocation prophétique de Jean le Baptiseur. Or Jésus aurait commencé son activité à 30 ans, après sa rencontre avec Jean, ce qui renvoie a naissance de Jésus avant le début de l’ère chrétienne.

 

« L’association forte qu’opère la tradition avec Hérode-le-Grand conduit à privilégier la période des dernières années du règne de ce roi, disons en 7 et 4 av J-C. Plus précis, on ne peut l’être. »

 

La question du lieu de naissance par contre reste ouverte.

 

Concernant l’existence de frères er soeurs, tous les évangélistes et l’apôtre Paul sont unanimes. « Jésus naît dans une famille ou il a des frères et des soeurs. »

 

Concernant la date de la mort de Jésus, la date du 7 avril 30 parait la plus crédible.

 

3). La Galilée du Ier siècle.

 

L’économie de la Galilée se compose avant tout d’agriculture et de pêche. Par contre la « propriété foncière est essentiellement régie par une économie de distribution ; elle appartient à de grands propriétaire qui confient l’exploitation de leur domaine à des fermiers. »

 

« La vie économique se polarise fortement entre les riches propriétaires et des travailleurs à situation précaire, petits paysans ou journaliers. Les tensions peuvent être vives entre propriétaires et fermiers tenus de verser une part importante de leur récolte (…) Quand aux petits paysans, leur sort est fragile. Il suffit d’une mauvaise récolte pour qu’ils soient ruinés et dépossédés des leurs biens. »

 

La richesse se concentre donc en ville.

 

« Le silence des évangiles sur les villes de Galilée signale que Jésus fut plutôt un homme des campagnes et qu’il partageait la culture et les soucis des paysans et des petits artisans. »

 

A cette époque la majorité des habitants de Galilée sont Juifs et parlent araméen.

 

II. Jean le Baptiseur et les prophètes de renouveau.

 

« L’un des faits les plus sûrs de la vie de Jésus est son baptême par Jean dans le Jourdain, au seuil de son activité publique. »

 

« Jean n’est pas une figure unique en son genre dans le judaïsme palestinien du Ier siècle ; on constate en effet l’émergence d’une constellation de groupes messianiques protestataires axés sur un programme de renouveau.

 

1). Jésus disciple de Jean le Baptiseur.

 

« Les évangiles, qui tous rapprochent Jean et Jésus au seuil de l’activité du Nazaréen, font du premier le précurseur du second (…) Or tout pousse à penser qu’historiquement, le rapport entre les deux homes fut inversé : Jean fut le maître, et Jésus le disciple. La concurrence vive qui s’instaura entre les communautés baptistes et les premières communautés chrétiennes poussa les chrétiens à dégrader la position du Baptiseur et à rehausser celle de Jésus. »

 

Jésus a exercé lui même la pratique baptismale à ses débuts, au sein du mouvement baptiste avant de le quitter pur conduire un ministère autonome.

 

« Le fond du message de Jean est eschatologique : le jour est proche où le jugement de Dieu va s’abattre sur Israël (….) On constate que ce mouvement de conversion rompt sur deux points avec la tradition prophétique. D’une part se reposer sur la filialité d’Abraham est illusoire (….) d’autre part, prescrire un rite de rémission des péchés par le baptême signifie que les mesures mises en place autour du Temple, avec ses sacrifices d’expiation sont devenues inopérantes. Le rite d’immersion concurrence directement les gestes sacrificiels faits au Temple ou lors du jour du Pardon (le Kippour), célébré en septembre - octobre chaque année. »

 

« Contre la prêtrise du Temple et son alliance sadducéenne avec le pouvoir, contre le programme de piété intérieure défendu par les pharisiens, Jean affirme que la situation nécessite des mesures d’urgence : la conversion ou la mort ! Son mouvement consacre donc la faillite des moyens usuels de salut. Proclamer que seul le baptême du Jourdain sauvera les fidèles au Jugement dernier, c’est reconnaître que l’appartenance au peuple d’Abraham n’est plus une couverture suffisante contre l’impureté du pays et l’infidélité de ses habitants ; le rituel du Tempe ne suffit donc plus pour se prémunir de la colère du Tout Puissant. Sur ce point Jésus suivra exactement les traces du maître du Jourdain : même perspective millénariste avec l’annonce d’un tournant prochain de l’histoire ; même appel à la conversion ; même voie nouvelle pour le salut ; même sentiment d’urgence. »

 

Par contre des points de divergence entre Jean et Jésus.

 

  • Jésus n’est pas un ascète. Alors que Jean pratique une ascèse vestimentaire (habits en poils de chameau), alimentaire (sauterelles et miel sauvage) et domiciliaire (vie au désert), Jésus est l’homme des villages et des foules, ouvert à tous.

 

  • Le Dieu de Jésus est un dieu de la Grâce, de l’amour sans limite, qui aime les mauvais comme les bons. Il a inversé le message de Jean axé sur la venue d’un Dieu de colère.

 

  • Aucun geste thérapeutique n’est attribué à Jean. Par contre, la pratique de la guérison est un facteur important dans l’activité de Jésus.

 

  • Jésus n’introduit pas dans le groupe de ses disciples la pratique du baptême que l’Eglise reprendra après lui. L’appel à la conversion est ainsi découplé de l’exigence du baptême. L’abandon du geste baptismal traduit sa réticence face aux ritualisés de purification, et plus encore, il atteste le pouvoir qu’il s’adjuge de pardonner les péchés jusque là réservé à Dieu seul.

 

2). Les prophètes messianiques de renouveau.

 

Jean le Baptiseur termine sa vie exécuté dans la forteresse de Macheronte sur ordre d’Hérode Antipas.

 

  • Pour l’évangéliste Marc, il s’agirait d’une vengeance d’Hérodiade, ex femme du demi-frère d’Antipas dont Jean aurait critiqué le remariage avec le roi.

 

  • Pour Flavius Josephe, il s’agirait plutôt d’un calcul politique d’Hérode Antipas qui cherche à prévenir le déclenchement d’une rébellion populaire entraînée par la prédication enflammée de Jean.

 

« Mais la protestation de Jean se comprend dans un contexte plus large de résistance juive au modernisme hellénistique (…) Hérode Antipas a conduit en Galilée une politique moderniste. En 19, il transfère sa capitale de Sepphoris à Tibériade (en l’honneur de Tibère). » Mais cette nouvelle ville est construite sur un ancien cimetière ce qui la rend impure aux yeux des Juifs pratiquants. « Participer à a cour d’Hérode revenait à opter pour la mode hellénistique, au mépris des valeurs traditionnelles juives. »

 

« Son réflexe de modernité était dans l’air du temps. La pax romana s’est installée au prix d’une politique d’intégration contrainte des nations dans l’Empire. Cultures et valeurs sont forcées de se résorber dans un mouvement que l’on peut à l’échelle de l’époque, taxer de mondialisation.

 

« A cette puissante stratégie d’intégration, les Juifs opposèrent une résistance plus vive que partout ailleurs. De l’an 26 à l’an 36, le gouvernement de Ponce Pilate en Judée est jalonnée d’éclats sanglants. »

 

Concernant Ponce Pilate, « Flavius Josephe et Phiole d’Alexandrie parlent d’un politicien roué, féroce parce que craintif, dur dans la répression, prompt à réprimer tout ce qui pouvait mettre en péril l’ordre romain (…) c’est dans leur tendance à charger les Juifs de la responsabilité de la croix, que les premiers chrétiens ont flatté l’image de Pilate. »

 

4 av J-C. Mort d’Hérode le Grand qui fait surgir de nombreux prétendants messianiques au trône. « L’idéal qui travaille ces éruptions populaires est de Tye théocratique plutôt que messianique : ls rebelles se comprennent comme le bras armé du Dieu-Roi (…) Les figures prophétiques ont en commun avec le Baptiseur de protester contre la souillure du pays par l’occupation romaine. Mais là où Jean institue un rite de purification et prône un retour à l’ordre moral, les prophètes de renouveau annoncent l’avènement d’un « signe » (….). Ces convulsions ânonnent le soulèvement de tout le peuple qui se prépare lentement et éclater en 66 à la suite des maladresses du gouverneur Florus. La première guerre juive est déclenchée. »

 

« L’homme de Nazareth a-t-il-été assimilé par le peuple à ce messianisme protestataire ? Plus d’un épisode de la vie de Jésus reçoit à partir de là un relief singulier. Son discours sur l’imminente venue du Règne de Dieu le rangeait d’emblée dans la nébuleuse des prophètes de renouveau. Ses guérisons et ses exorcismes pouvaient être compris comme anticipant la libération à venir. L’étrange miracle des pains offrait aux foules « en un lieu désert » un substitut de manne. »

 

Si l’on s’interroge sur le profil que présentait Jésus du point de vue sociologique , la figure du prophète eschatologique (ou messianique) offre l’analogie la plus proche.

 

IV. Au coeur de la conviction de Jésus : le règne de Dieu.

 

« Au coeur du discours et de l’agir de Jésus se trouve une notion toujours présente mais jamais définie : le règne de Dieu. Elle n’est pas définie parce qu’elle v de soi pour le judaïsme ancien. »

 

1). Le règne de Dieu déjà présent.

 

« Jésus ne fait pas que partager l’espérance commune de son temps en une venue future du Dieu-Roi. Il vit la conviction que ce Règne de Dieu se réalise déjà avec lui. »

 

2). Une pratique thérapeutique.

 

Cinq types de miracles sont attribués à Jésus :

 

  • Guérisons (allant jusqu’à la réanimation des morts)

  • Exorcismes.

  • Miracles justifiant une pratique.

  • Prodiges de générosité.

  • Sauvetage sur le lac.

 

« Jésus arbore les mêmes compétences que d’autres thaumaturges de l’antiquité et sa façon de guérir un sourd-muet mettant les doigts dans les oreilles, crachant et touchant la langue s’aligne sur des gestes thérapeutiques connus. »

 

« Jamais le pouvoir de faire des miracles n’est contesté à Jésus par ses interlocuteurs, mais ce dont ses adversaires l’accusent, c’est d’agir au nom de « Beelzé’boul », le chef des démons. Autrement dit, ils accusent Jésus de faire de la magie et non de guérir au nom de Dieu (….). Les guérisons qui se produisent ne sont pas que l’effet de la compassion de Dieu dont Jésus se fait le vecteur, elles sont l’effet du pouvoir de Dieu qui prend possession de l’humanité, et dont lui , Jésus, est le médium. »

 

3). Conjurer la déception.

 

« Jésus, donc, ramène au présent ce que ses contemporains attendaient du futur. Mais comment admettre que le Règne est là sans que la société soit métamorphosée ? (…) Comment concevoir que cet immense événement se produise entre les mains d’un Galiléen et de sa poignée de disciples ?

 

Jésus répond à ces objections de deux manières :

 

  • Plusieurs paraboles répondent à la déception (parabole du grain de moutarde).

 

  • Jésus détourne le regard fixé sur le calendrier de la fin des temps pour l’orienter sur l’actualité du règne

 

 

 

4). Un règne à l’horizon de l’histoire.

 

Pour Jésus, « le règne » s’inscrit dans une temporalité particulière : la frontière se place « entre le présent, qualifié par la nouveauté et le passé. ». Le présent et l’avenir ont fondamentalement même qualité. Le règne de Dieu n’est donc pas un segment du calendrier, mais une dynamique que Jésus met en branle. »

 

Jésus renverse donc la perspective car il estime que le présent nécessite des mesures fortes. « Au temps nouveaux correspond la mise en place de nouveaux comportements. La réinterprétation de la Torah est pour l’homme de Nazareth le lieu de définition de cette nouvelle attitude. »

 

V. La refondation de la foi.

 

« La compréhension de Dieu mise en avant par Jésus devait se cristalliser en ce lieu incontournable qu’est la Torah, écrin millénaire de la volonté du Dieu d’Israël. Et cela pour une raison simple : dans l’incroyable diversité qui caractérisait la mouvance juive au temps de Jésus, chaque groupe, sans exception, se définit par la lecture qu’il fait de la Loi. Plus encore que le Temple, la Torah joue dans ce judaïsme bigarré des années 30 un rôle de lieu identitaire, ce qu’atteste le questionnement serré dont Jésus est l’objet de la part de ses interlocuteurs. »

 

1). Respecter ou transgresser la Loi.

 

Les interventions de Jésus sur la question de la Loi donne lieu à deux considérations

 

  • « Les strates les plus anciennes de la tradition n’ont retenu aucune déclaration de Jésus sur l’autorité ou la validité de la Torah ; on en conclura que Jésus s’est prononcé de manière circonstancielle, de cas en cas, s’inscrivant dans l’espace de reconnaissance de la Loi dans la problématiser comme telle. »

 

  • «  Jésus rompt avec la pratique rabbinique. Il ne fonde pas d’école de la Torah et ne s’engage pas dans la réglementation casuistique de l’obéissance que l’on appelle la halakah. »

 

Le débat entre Jésus et les scribes s’est dégradé sur la question du sabbat. Pour Marc c’est ce litige qui serait la cause de la mort de Jésus (il profite du jour du sabbat pour effectuer une guérison ou un exorcisme).

 

« Le geste de Jésus n’est pas si novateur qu’il y paraît : savoir si le repos sabbatique peut-être transgressé pour sauver une vie est une question débattue au Ier siècle, et même les esseniens, pourtant les plus rigoristes, tolèrent une exception pour sauver un homme. »

 

«  La singularité de Jésus ne réside donc pas dans la transgression comme telle, mais dans son désintérêt à codifier l’entorse faite au sabbat, et dans la simplicité de l’alternative qui la justifie : faire vivre ou faire mourir. »

 

«  Le désintérêt de Jésus à l’égard du code de pureté, fondé sur les prescriptions du Lévitique, à plus d’une fois offusqué ses coreligionnaires. »

 

Pour Jésus l’impératif de l’amour est plus important que la défense de la pureté.

« Les paroles provenant du cœur de l’homme sont infiniment plus dangereuses pour sa pureté que les aliments. Jésus exprime ainsi sa défiance à l’égard d’une législation qui conduit le fidèle à défendre son intégrité religieuse tout en tolérant l’agression verbale envers autrui. »

 

Le principe de l’amour, gouverne la compréhension qu’a Jésus de la Loi et fonctionne comme norme interprétative dans sa lecture de l’écriture.

 

2). Le principe de l’amour.

 

« Résumer la demande de la Torah dans les deux commandements d’aimer Dieu et d’aimer son prochain comme soi-même ne constitue pas une nouveauté dans la théologie juive. Si donc le fait de récapituler la Torah dans le double impératif d’amour n’est pas une particularité de Jésus (….) la radicalité avec laquelle il l’applique n’a pas de précédent, Jésus absolutiste un donné qu’il a trouvé présent dans son milieu. »

 

« En somme, Jésus refonde la Torah sur l’exigence inconditionnelle de l’amour, mais seule sa parole légitime cette refondation. Son « Je », qui appelle impérieusement à placer le souci d’autrui au centre de la Loi, exprime la surprenante autorité et la choquante liberté que Jésus se reconnaît. Ce « Je » excède totalement les normes de la tradition orale. C’est lui qui promulgue l’autorité de la Torah recentrée sur l’amour, alors que la tradition juive vit du mouvement inverse : seule la Torah fonde l’autorité de celui qui la sonde. »

 

VI. Jésus et son groupe.

 

«  Les fréquentations de Jésus illustrent le programme de refondation de la Torah. La choquante liberté de ses relations sociales et la composition de son cercle de disciples sont un effet direct du primat de l’amour. Décrire ces pratiques sociales permettra de remonter au fondement de sa morale, où nous cernerons son image de Dieu. »

 

1). Des choix de solidarité sociale.

 

Jésus s’est rendu solidaire des catégories sociales que marginalisait la société juive du temps, par méfiance sociale, soupçon politique ou par discrimination religieuse :

 

  • Peuples de la terre (population des campagnes), qui ne peuvent satisfaire au code rigoureux de pureté et de payer les trois dîmes recommandées sur tout produit.

 

  • Enfants. Ils sont des mineurs dans la société juive. Ils ne possèdent pas la connaissance de la Torah.

 

  • Collecteurs d’impôts. Ils ne sont pas appréciés de la population qui leur reproche leurs exactions financières

 

  • Femmes. Il n’hésite pas à admettre les femmes dans son entourage malgré leur disqualification religieuse (naissance et menstruations) qui les plaçaient en état d’impureté religieuse.

 

  • Samaritains. Les Samaritains sont rejetés en raison de leur schisme religieux

 

  • Malades. Il n’hésite pas à approcher et toucher les malades.

« Au total, l’homme de Nazareth s’est rendu solidaire de toutes les marginalités sociales du temps. »

 

2). Disciples et adhérents.

 

L’entourage de Jésus se compose de trois cercles :

 

  • Le cercle des Douze, tous mâles, tous galiléens. La liste varie un peu, mais comprend toujours Pierre, André, Jacques et Jean, Judas.

 

  • Des hommes et des femmes qui suivent Jésus : Marie de Magdala, Jeanne femme de Chouza l’intendant d’Hérode, Suzanne, Salomé.

 

  • Un cercle plus large de sympathisants : Joseph d’Arimathie, Nicodeme, Lazare, Marthe et Marie.

 

Ce large éventail est tout le contraire d’une secte.

 

Mais le nombre de disciples, 12, choisi à cause du nombre des tribus d’Israël, est l’indice d’une reconstitution symbolique du peuple de Dieu.

 

« La stratégie de Jésus travaille donc à l’inverse des pharisiens, à l’inverse de Jean le Baptiseur ou des prophètes de renouveau ; car les uns et les autres opèrent par exclusion, par sélection, en vue de constituer le pur Israël. Jésus adopte au contraire une posture d’intégration.

 

3). Le Dieu de Jésus.

 

L’image de Dieu qui habite Jésus, est « l’image d’un Dieu qui aime sans conditions, et dont la bonté ne tue pas les bénéficiaires. Plus encore, c’est un Dieu dont l’accueil précède toute prestation humaine. On discerne ici, très précisément sur quel point Jésus s’est heurté aux pharisiens : alors que la théologie pharisienne fait de la conversion le préalable à la réintégration du Pecheurs, Jésus met en avant une grâce divine que ne grève aucune condition. »

 

VI. La crise de la croix .

 

Après deux ou trois ans d’activité en Galilée, Jésus, pour des raisons inconnues décide de se rendre à Jérusalem.

 

1). L’agression au Temple.

 

Son séjour à Jérusalem débute par l’épisode des marchands du Temple qu’il chasse (c’est le seul acte de violence qu’on lui connaisse). Si ce scandale, ne provoque pas l’intervention de la police du Temple, il alarme par contre les grands prêtres et les scribes.

 

En évoquant cette crise Marc « affiche ici une alliance politique nouvelle, inconnue jusque-là, face à Jésus, entre l’aristocratie sadducéenne et les scribes. Qui plus est, ces nouveaux alliés feront coalition avec la foule. Le peuple jusqu’ici plutôt favorable au Galiléen, va dès lors se retourner contre lui. »

 

Pourquoi cette coalition contre lui ? « Le Temple joue en Israël un rôle symbolique déterminant, puisqu’il concrétise l’attachement de Dieu à son peuple (….) Toucher au Temple, c’est toucher à l’identité du peuple. L’attentat de Jésus a Clairement une portée symbolique. il se produit dans l’encens et du Temple qui constitue une sorte de sas entre le monde païen et le monde sacré. » Si cette barrière disparaît, le Temple perd sa protection : il se fond dans la ville.

 

«  L’espérance messianique au temps de Jésus (….) attendait pour la fin des temps la disparition du Temple (….) Le geste de Jésus sonne comme une destruction symbolique du Temple, qui étend la pureté du sanctuaire à toute la ville (….) Le geste de Jésus s’inscrit donc dans le fil de l’attente messianique de son temps, mais il la précipite en mettant symboliquement fin aux moyens traditionnels qui régissent le rapport du Peuple avec Dieu. »

 

2). Les motifs de la crise.

 

« La reconstitution des événements qui ont conduit à l’exécution de Jésus est entachée de nombreux points d’obscurité. Parmi eux, les motifs réels de la condamnation de Jésus et le rôle exact joué par les Juifs. »

 

Une certitude. La peine fut romaine prononcée par le préfet Ponce Pilate, mais l’arrestation fut le fait des Juifs.

 

« Pour les premiers chrétiens, il est évident que le litige entre l’Eglise et la Synagogue porte sur la messianité de Jésus. Mais se déclarer Messie dans le judaïsme du Ier siècle, n’encourt pas la peine capitale (…) En outre, il est extrêmement difficile d’admettre que Jésus se soit ainsi déclaré comme le Messie. Lui qui toute sa vie s’est refusé à bloquer sont identité sur un titre, comment imaginer qu’à la dernière minute, il renie sa détermination (….) L’identité messianique fut affectée à Jésus après coup par les premiers chrétiens, en vertu d’une logique d’attribution (massivité prétendue) plutôt que d’une logique de revendication (messianité prétendante) (….) Le refus de Jésus ne s’est donc pas joué sur sa messianité mais sur des griefs plus centraux, et par là plus vitaux dans le logique du judaïsme. Ces griefs devaient faire l’unanimité du Sanhédrin contre Jésus. »

 

Deux griefs possibles :

 

  • Son attitude face au Temple. Des témoins rapportent les paroles de Jésus sur la destruction du Temple et sa reconstruction en 3 jours. « Toucher au symbole même de la présence de Dieu, mettre en péri cette garantie de la présence de Dieu en Israël, c’était commettre un irréparable attentat (…). Du côté juif, la Loi prévoit que le faux prophète doit mourir, et à la fin de la comparution au Sanhédrin, Jésus est traité comme tel. ».

 

  • Son attitude face à la Loi. « Cette accusation n’est pas formulée comme telle lors du procès, le grief de messianité ayant pris sa place. (…) Jésus a cassé les règles du jeu : son mais moi je vous dis, qui défie l’autorité de Moïse lui même, outrepasse les limites de l’acceptable. En radicalisant le primat de l’amour, en détruisant au nom du règne de l’amour toute limite apportée à la Loi, Jésus fait éclater de l’intérieur le système de l’obéissance (…). En s’attaquant au Temple et à la Loi, Jésus s’en prenait pour ainsi dire aux lieux saints de la foi juive. L’éventualité d’un succès populaire de sa prédication a dû paraître intolérable à l’élite sadducéenne. »

 

3). Conscience de la fin.

 

Jésus a-t-il prévu sa mort.

 

« Quitter l’abri de sa Galilée natale pour monter à Jérusalem sans y être forcé, et à la Pâque encore, c’était prendre des risques. Jésus s’exposait au coup de force. »

 

Jésus a-t-il compté avec une mort inéluctable ?

 

Deux indices vont dans ce sens.

 

  • La parole sur le feu jeté sur la terre. Le feu qu’allume Jésus est celui du règne.

 

  • La réponse de Jésus à une mise en garde des pharisiens : « va t-en, pars d’ici car Hérode veut te faire mourir. » lui disent-ils ; et Jésus : «  Allez et dites à ce renard : « Voici je chasse les démons et j’accomplis des guérisons aujourd’hui et demain, et le troisième jour j’attends la fin. » Dans cette phrase Jésus fait allusion à sa mort pour affirmer que sa vie n’est pas à la merci du roi mais à disposition de Dieu pour guérir. »

 

Par contre il est impossible de savoir à quel moment de sa vie Jésus a-t-il acquis le sentiment que sa fidélité à Dieu le conduisait à la mort.

 

« Le dernier repas qu’il partagea avec ses disciples à la veille de son arrestation fut l’occasion d’un geste de solidarité et de communion. Le repas ne fut pas un repas pascal (il manque l’agneau) (…) Plus que le pain rompu, c’est le pain partagé qui a fait communion entre les convives. Boire à la même coupe concrétisait une même solidarité à un destin difficile (…) Le souvenir de ce repas de la dernière heure a été surchargé de sens après la croix ; mais il n’y a pas lieu de mettre en doute le fait qu’à la veille d’être arrêté, Jésus ait institué avec ses disciples un rite de convivialité destiné à lui survivre. »

 

4). Le procès, la sentence, le supplice.

 

Ponce Pilate suit la procédure judiciaire appliquée en province (cognitio extra ordinem) dont la procédure est la suivante :

 

  • Parole aux plaignants, c’est-à-dire les autorités religieuses juives (aristocratie et sadducéens). Ils accusent Jésus de troubles à l’ordre public, en fonction d’une prétention messianique.

 

  • Parole à l’accusé. Jésus se contente de se taire ce qui décontenance Pilate.

 

Ponce Pilate est un préfet craintif qui n’hésite pas à réprimer toute agitation populaire. Mais de l’autre côté, il ne tient pas à servir les intérêt des chefs juifs qu’il déteste. « C’est pourquoi l’offre de libérer un prisonnier à l’occasion de la fête pascale a pu lui convenir. »

 

« L’entourage du grand prêtre espérait liquider le cas du nazaréen sans faire de bruit d’où l’arrestation nocturne d’où la convocation du Sanhédrin anormalement tôt, à l’aube, d’où enfin le transfert à Pilate le matin même (…) Mais la foule, survenant sur ces entrefaites, déjoue leurs plans en réclamant l’amnistie pascale. Perturbation que les chefs juifs surmontent en excitant les gens contre Jésus qu’ils viennent de livrer. »

 

Afin de dégager sa responsabilité Pilate feint de céder à la voix populaire alors que la décision finale lui appartient et Jésus est condamné pour rébellion à l’autorité impériale.

 

« Selon l’usage Jésus a été battu de verges avant la crucifixion. Le détachement chargé de l’exécution, tirant prétexte de ce délit, organisa pour se distraire une mise en scène grotesque, qui parodiait les fêtes saturnales où l’on couronnait un roi tiré au sort. On remit au prisonnier les emblèmes d’une royauté de carnaval : tunique de pourpre, roseau en guise de sceptre, couronne d’épines. »

 

Jésus est chargé de la croix, en fait seulement la partie transversale (patibulum) qu’il doit porter jusqu’au Golgotha. Le pieu vertical est déjà fiché en terre. Mais faiblissant en cours de route, l’escorte réquisitionne un paysan qui rentre des champs : Simon de Cyrénaïque.

 

Jésus est pendu à 3 clous, un dans chaque avant-bras (et non dans la paume de la main) et un plus long à travers les talons joints. Un support de bois placé sous les fesses évitait au corps de se déchirer mais prolongeait l’agonie. Le supplicié décédait par asphyxie.

 

« L’agonie de Jésus fut brève, indice que sa constitution n’était pas très robuste (…) La mort de Jésus n’eut d’extraordinaire que sa rapidité. »

 

VIII. Naissance de la tradition de Jésus.

 

« Les évènements de Pâques marquent d’un point de vue historique, le départ de la tradition de Jésus. C’est à partir de là que la destinée de l’homme de Nazareth devient l’objet d’une proclamation de la part de ses disciples, et que se recrute, à Jérusalem tout d’abord, une communauté juive croyante au Messie Jésus. »

 

1). Pâques, une expérience visionnaire.

 

Jésus est-il ressuscité ? L’historien ne peut ni confirmer, ni infirmer ce fait. Les sources à ce sujet divergent et leur seul élément commun est l’affirmation que le Christ « s’est fait voir. »

 

« Les évènements de Pâques s’inscrivent comme une expérience spirituelle forte survenue aux compagnons de Jésus. »

 

« Les répercussions historiques de Pâques sont évidentes et objectives : les disciples en fuite se rassemblent ; leur peur s’inverse en courage ; la mort de Jésus n’est plus regardée comme un échec, mais comme le lieu d’une présence de Dieu auprès du réprouvé : une communauté se reforme à Jérusalem et fait du prosélytisme. »

 

« Pâques va désormais fonctionner comme le point focal de la relecture, ou plutôt des relectures de l’histoire de Jésus. Paroles et gestes du prophète de Nazareth sont interprétés à partir de l’effet Pascal et cet effet peut-être énoncé ainsi : Dieu a fait connaître son assentiment au ministère de Jésus ; ce ministère doit dès lors être considéré comme la révélation décisive, ultime, eschatologique du dessein de Dieu pour les hommes. »

 

 

 

2). En quête de l’identité de Jésus.

 

Pâques est le point de départ des déploiements christologiques.

 

IX. Epilogue : la mémoire de l’origine.

 

« En préservant et en canonisant quatre évangiles, qui sont autant de biographies à l’ancienne que des relectures pascales de l’histoire de Jésus, l’Eglise primitive n’a pas voulu simplement fixer un souvenir historique. Elle a surtout sanctionné un choix théologique. L’identité du Christ ne peut-être saisie en dehors d’une narration qui restitue la vie du nazaréen. »

 

 

Dernière modification : 21 juin 2023



22/06/2023
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