Winock (M). Le siècle des intellectuels : 2eme partie : Les années Gide. (NDL)

LE SIECLE DES INTELLECTUELS (2)

 

 

Michel Winock. 

 

Paris, Seuil, 1999, 885 pages. 

 

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Deuxième partie. Les années Gide.

 

Chapitre 17. André Gide le « démoniaque ». 

 

Quand Barrès s’éloigne de la scène, André Gide est en passe de le remplacer à l’affiche. Il n’accède vraiment à la notoriété qu’après la Grande guerre. Avec les « nourritures terrestres », il donne carrière à son personnage sulfureux. On l’accuse de contaminer la jeunesse de déshonorer les lettres françaises.

 

A son retour de captivité, Jacques Rivière devient le directeur de la NRF. La revue interrompue durant la guerre reparait le 1er juin 1919, tandis que le « comptoir d’édition » devient la librairie Gallimard. En 1920 elle atteint 7000 abonnés et publie presque tous ceux qui compteront dans la littérature française. 

 

Gide qui n’avait cessé de souffrir du tabou qui pesait sur sa vie sexuelle, voulait publier depuis longtemps un livre sur l’homosexualité, pour parler pour se libérer et libérer tous ceux qui souffraient de cet état d’hypocrisie entretenu par les préjugés, les qu’en dira t’on, la religion. Ce sera « Corydon » qui paraît à l’automne 1924. Parallèlement il publie « si le grain ne meurt ». Ces deux ouvrages hissent Gide sur e devant de la scène qu’il ne quittera plus jusqu’à sa mort. Pour beaucoup il devenait celui qui osait le vrai, qui brisait la glace des convenances et le cercle des interdits.

 

Chapitre 18. Jaurès, Lénine ou … Gandhi. 

 

La mort de Barrès provoque la parution de deux numéros, contre lui, de la revue « Clarté » qui avait adhéré à la révolution bolchevique tout en gardant son indépendance à l’égard du jeune Parti Communiste. 

 

A la fin de 1916, Raymond LefebvrePaul Vaillant CouturierPaul Roubille, lancent un appel à Romain Rolland, Wilhelm Herzog directeur de revue et pacifiste allemand, à Wilhelm Foerster philosophe et pacifiste allemand réfugié à Zurich, à HG Wells, en faveur d’une revue internationale. Son but est de regrouper une « élite dispersée » qui dirait la vérité sur la guerre. Henri Barbusse s’intéresse à l’idée et propose un programme : « rapprochement et libération des masses populaires, guerre à l’autocratie, à l’exagération du nationalisme et du traditionalisme, à l’ignorance, à l’alcoolisme et au cléricalisme. » 

 

Au sein de la SFIO, Lefebvre milite pour le ralliement à l’Internationale communiste et participe avecBarbusse à la création du groupe « clarté » ligue de solidarité intellectuelle pour le triomphe de la cause internationale. Le paradoxe voulut que les adversaires les plus avancés de la guerre, de la boucherie de 14/18 donnèrent leur vois à une révolution qui portait en elle la guerre, la guerre civile et la guerre étrangère. Ils prirent la révolution des soviets pour une révolution de l’autonomie ouvrière,, avant de découvrir qu’elle était ce qu’ils exécraient le plus c'est-à-dire la prise du pouvoir par un parti pour une bureaucratie et finalement un dictateur. 

 

La terreur par contre ne faisait pas peur à un certain nombre d’historiens, dont Albert Mathiez, qui prit pour objectif d’expliquer la révolution léniniste au moyen de la grille de la révolution française. La fin justifiant les moyens, il estimait que les bolcheviques avaient simplement perfectionné les méthodes jacobines. Lui aussi milita en faveur de l’adhésion de la SFIO à l’internationale communiste. Après le Congrès de Tours, il entra au PCF. Il fut de ceux qui, enthousiasmés par la révolution russe en furent profondément déçus dès 1922-1923. Il comprit que Moscou était le centre d’un mouvement communiste international au sein duquel les partis nationaux devaient se plier à la loi de Moscou. 

 

La revue mensuelle « clarté », lancée en 1921, fut la première expression intellectuelle du communisme français. Elle dénonçait avec violence le patriotisme bourgeois et s’en prit en particulier à Barrès et à Anatole France. Puis la revue évolua vers le groupe surréaliste et vers la défense de « l’opposition russe ». Elle disparaît en 1928.

 

L’histoire de Clarté témoigne de l’élan d’une génération de jeunes anciens combattants vers la révolution léniniste, mais aussi vers la possibilité qui lui était encore laissée de faire entendre un son de cloche différents du carillonnement communiste. Barbusse quitta rapidement la revue pour mettre toute son énergie au service du PC jusqu’à sa mort en 1935.

 

Par contre R Rolland se détache du bolchevisme contestant toute allégeance à une autorité supérieure fut elle le défenseur du prolétariat. Il se tourne vers l’Asie et de rapproche de R Tagore, décidé à fonder une université internationale à Santiniketan qui enseignerait les valeurs de la tolérance. La non violence de Gandhi exerce sur lui un attrait philosophique. 

 

Dans cette fidélité au pacifisme, Romain Rolland fonde avec René Arcos et Paul Colin, une revue internationale. Ce sera « Europe » qui sort en février 1923. Revue de culture, d’esprit international, elle sera plus tard dans les années trente une des expressions du compagnonnage de route avec le communisme.

 

Chapitre 19. La révolution surréaliste. 

 

Le premier groupe surréaliste se compose de : AragonSoupaultBretonFraenkelAragon entretient par ailleurs une correspondance avec Paul ValeryJean PaulhamPierre Reverdy. Puis le groupe s’enrichit de l’arrivée de Paul Eluard.

 

En mars 1919, parution de la revue « Littérature ». En 1920, elle change de ligne en publiant dans son numéro 13, 23 manifestes Dada.

 

A la fin de 1921, le groupe surréaliste prend ses distances avec Dada. Un premier noyau (Breton, Aragon, Eluard, Ernst, B Peret) fusionne avec un autre groupe (Jacques Baron, René Crevel, Robert Desnos, Max Morise et Roger Vitrac). En désaccord, Breton et Tzara polémiquent l’un contre l’autre. Les surréalistes deviennent alors un mouvement réellement autonome identifié en 1924 par le lancement de la revue « La Révolution surréaliste » que préface le « manifeste du surréalisme » rédigé par André Breton.

 

Il en arrive à une définition définitive du surréalisme : « Automatisme psychique pur par lequel on se propose d’exprimer soit verbalement, soit par écrit, soit de toute autre manière, le fonctionnement réel de la pensée. Dictée de la pensée, en l’absence de tout contrôle exercé par la raison, en dehors de toute préoccupation esthétique ou morale. Le surréalisme repose sur la croyance à la réalité supérieure de certaines formes d’associations négligées jusqu’à lui, à la toute puissance du rêve, au jeu désintéressé de la pensée. Il tend à ruiner définitivement tous les autres mécanismes psychiques et à se substituer à eux dans la résolution des principaux problèmes de la vie. » 

 

Le surréalisme représente une révolte contre l’ordre et la littérature établis, contre tout ce qui entrave la liberté humaine, patrie, famille, religion morale. 

 

La guerre du Rif va déterminer l’engagement des surréalistes sur le terrain politique. Peu à peu ceux-ci se rapprochent de la revue Clarté et adoptent les thèses du marxisme-léninisme sans pour autant adhérer au PCF. En Fait ils entendent mener des actions parallèles à celles du PCF. Breton et ses amis, sincèrement acquis à l’idée révolutionnaire s’imaginent pouvoir donner au PC ce qui lui manque. Une esthétique révolutionnaire. Mais la direction du parti est moins soucieuse d’imposer un avant gardisme littéraire que de gagner des compagnons de route. 

 

Chapitre 20. Rome contre l’Action française.

 

Après la guerre, l’Action française apparaît pour beaucoup comme l’aile droite du grand parti conservateur et nationaliste qui soutient la politique de Poincaré. Elle défend une politique intransigeante face à l’Allemagne et Maurras pense que le Traité de Versailles lui a encore été trop favorable.

 

De plus l’Action française offre aux jeunes gens en quête d’ordre intellectuel et moral, un cadre d’action qui n’eut d’autre exemple en France que l’organisation communiste située aux antipodes. 

 

Maurras qui avait perdu la foi continuait de considérer l’Eglise comme un pilier nécessaire de l’ordre social. C’était donc un catholicisme strictement politique qui risquait de détourner les vrais chrétiens de la pure foi au profit d’une nouvelle religion, celle de la Patrie. 

 

En réaction, le 29 décembre 1926, Pie IX mettait l’Action française à l’index. Le 8 mars 1927, un rescrit de la Sacrée Pénitencerie précisait les sanctions contre les catholiques qui persisteraient à se faire les propagandistes des idées de Maurras. Pour les catholiques de l’Action française, ce fut un déchirement.

 

Bernanos restera fidèle à Maurras jusqu’en 1932, alors que Jacques Maritain se plie aux injonctions de Rome. 

 

La condamnation de l’Action française eut pour conséquence  de changer le climat du milieu intellectuel catholique. La nouvelle génération émancipée de l’influence de Maurras allait penser autrement son rapport à la politique. 

 

Chapitre 21. La trahison des clercs. 

 

1927, publication par Julien Benda de « la trahison des clercs » qui est une réflexion sur le rôle des intellectuels dans la cité, rôle qu’ils n’ont pas assumé ou du moins n’assument plus. « La moralité générale actuelle me semble être extrêmement basse (…). Ceux qui avaient pour fonction de leur prêcher l’amour d’un idéal, d’un supra-temporel (les hommes de lettres, les philosophes, disons d’un mot les clercs) non seulement ne l’ont pas fait, mais n’ont travaillé qu’à fortifier de tout leur pouvoir ces religions du terrestre. »

 

« Julien Benda illustrait aussi à sa façon, raide, abstraite, concise la théorie des deux pouvoirs, le pouvoir temporel et le pouvoir spirituel, qui était dans la pensée du Saint Simon, d’Arthur Comte et d’Alain. Il faut dans toute société face à des puissants, un pouvoir spirituel, intellectuel, honoré selon une autre hiérarchie, qui rappelle les principes éternels sur lesquels est fondée cette société. Ses détenteurs ont effectivement quelque chose qui s’apparente au prophétisme, qui est détaché des conséquences immédiates de ce rappel à la loi morale. (…) Ce livre est prophétique aux deux sens du mot, dénonciateur et annonciateur. Il dénonçait l’intelligence qui donnait les justifications savantes et littéraires aux déchainements des passions particulières (…), il annonçait ce que deviendraient les sociétés qui annuleraient tout pouvoir spirituel indépendant : des régimes totalitaires. » 

 

Chapitre 22. Des jeunes gens en colère. 

 

Charles Péguy devient l’auteur culte de toute une nouvelle génération de jeunes intellectuels qui développent un courant indépendant des mouvements traditionnels. Ils sont « non-conformistes » et formeront ce qu’on appela la Jeune Droite qui tente de renouveler la pensée de Maurras, par les groupes Esprit dominés par la personnalité de Mounier et par Ordre nouveau dirigé par Arnaud DandieuRobert Aron et Alexandre Marc.

 

Ces jeunes gens de droite ou de gauche partagent un sentiment très fort de génération et malgré les divergences entre les sensibilités, i y eut entre toutes les revues, quelques années durant un « esprit des années trente » ne dépassant pas 1934-1935. 

 

« Ces jeunes éprouvent la sensation d’étouffer dans une société de gérontes qui remâche l’âge d’or de la Belle époque. Plus profondément, ils expriment leur colère contre ce qu’ils appelaient le monde de l’argent, le monde du productivisme, dont le symbole devient l’Amérique et sa société de consommation. En quelques années, les USA vont passer dans l’imaginaire collectif de Babbit (l’anti héro de Sinclair Lewis symbolisant le monde sans âme des classes moyennes américaines), aux « raisins de la colère » de John Steinbeckillustrant la grande faillite du rêve américain. » 

 

« Rejetant le libéralisme, le marxisme, les mystiques fascistes, ces jeunes développent le personnalisme qui est un appel à la responsabilité de chaque être humain. Ils condamnent à la fois le libéralisme qui réduit l’homme à la série électorale et à la série production-consommation et contre les régimes totalitaires qui, bien qu’antilibéraux, n’en sont pas moins les ennemis de la personne, irréductible à l’idéologie de l’Etat. » 

 

« Le tournant des années vingt aux années trente est affecté par un bouillonnement de la jeunesse intellectuelle : Chez les radicaux Bertrand de Jouvenelle anime les Jeunes Turcs, chez les socialistes André Philip diffuse les idées du belge Henri de Man qui défend le planisme (socialisme éthique et de la planification). »

 

Un groupe de jeunes philosophes commence à émerger avec Paul NizanJean Paul SartreRaymond AronEmmanuel Mounier. En 1933, cette nouvelle génération se révèle à travers trois discours. 

La jeune droite (MaxenceFabrèguesBrasillach, Bardèche…), plus ou moins émancipée de la doctrine de Maurras.

Ordre nouveau et Esprit, qui représentent de remarquables laboratoires de pensées.

Les communistes (Henri LefebvrePierre MorhangeGeorges PolitzerPaul NizanGeorges Cogniot,Jean Bruhat)

 

« Aux deux extrêmes, ces jeunes étaient séduits ou attirés par les expériences qui se déroulaient dans l’Italie fasciste et en Union soviétique. Au centre, ils voulaient emprunter à l’un et à l’autre des régimes, non pas pour copier (ils étaient hostiles à tous les étatismes) mais pour fonder une autre démocratie centrée sur la personne, décentralisée jusqu’à la personne, une personne devenue enfin responsable. » 

 

Chapitre 23. Au service de la Révolution. 

 

En 1927, 5 membres du groupe surréaliste adhèrent au PCF : Benjamin PeretLouis Aragon, André Breton, Paul Eluard, Pierre Unik.

 

Pour Lénine, la littérature avait un devoir : servir la révolution. Une première «conférence internationale des écrivains prolétariens et révolutionnaires » se tient à Moscou en novembre 1927. La France est représentée à la fois par Henri Barbusse et Paul Vaillant Couturier, mais aussi par Pierre Naville et Francis Gérard du groupe Clarté opposé à Barbusse.

 

A la suite du congrès de Moscou, Barbusse fonde la revue Monde en juin 1928. Cet hebdomadaire entend lutter contre la réaction et « faire progresser la littérature et l’art prolétariens qui doivent briller et triompher toujours davantage dans la société d’aujourd’hui et de demain. »

 

Parallèlement la revue Clarté acquise au trotskisme devient La Lutte des classes.

 

Les surréalistes pour leur part suivent Staline et non Barbusse qui est dénoncé par l’URSS parce que sa revue, trop pluraliste est incapable de faire connaître la littérature prolétaire russe. 

 

Le Congrès de Kharkov du 6 au 15 novembre 1930 a pour but d’imposer une ligne dure aux responsables communistes de la culture dans le monde. Barbusse y est mis en accusation et sa revue Monde est condamnée comme « promoteur des idéologies hostiles au prolétariat ». Aragon et Sadoul signent un texte d’autocritique dans lequel ils reconnaissent leur erreur de n’avoir pas fait contrôler leur activité littéraire par le Parti et leur volonté de se désolidariser de « toute idéologie confusionnelle touchant le trotskisme » (ce qui est un désaveu du 2e manifeste du surréalisme). Mais cette autocritique leur permettait d’entrer dans l’Union internationale des écrivains révolutionnaires.

 

C’est à son retour en France, qu’Aragon achève son poème « front rouge » à la gloire du Guépéou (qui paraîtra en juillet 1931). Mais la violence subversive du poème entraine la saisie de la revue dans laquelle il était publié (littérature de la révolution mondiale) et l’inculpation d’Aragon pour incitation de militaires à la désobéissance et provocation au meurtre dans un but de propagande anarchiste. 

 

Tiraillé entre les exigences de l’Internationale communiste et celle des surréalistes, Aragon rompt avec Breton et le groupe surréaliste en mars 1932. 

 

« Péripéties et rivalités personnelles mises à part, le surréalisme ne pouvait faire bon m »nage avec le communisme. Celui-ci dont la ligne alternait entre le durcissement sectaire et son contraire, l’élargissement à tous les alliés possibles, plaçait à chaque fois le surréalisme en porte à faux. L’insoumission intellectuelle des surréalistes aux instances du parti était inacceptable, quand bien même leur soumission politique voulait être totale. »

 

Chapitre 24. Gide et la séduction communiste. 

 

En juin 1926, retour de Gide du Congo où il a passé près d’un an. Horrifié par l’exploitation des indigènes par les grandes compagnies, il décide de témoigner. Ce sera « Voyage au Congo » publié par la NRF en 1927. Cette publication aura pour conséquence, en 1929, le non renouvellement du régime des grandes concessions qui avait permis cette exploitation des indigènes. 

 

Plus tard au cours de l’année 1931Gide devient un sympathisant communiste. De même Romain Rolland, toujours à la recherche de « l’unité spirituelle du monde » s’éloigne définitivement de la pensée non violente de Gandhi. Il rejoint les défenseurs de l’URSS. 

 

Après le 6 février 1934, le danger fasciste renforce le camp des amis de l’URSS. 

 

« L’affaire Dreyfus avait été la victoire de l’examen critique. L’histoire des compagnons de route, qui s’accélère au début des années trente, est toute contraire. L’adhésion des intellectuels est de pure foi. Quand même on leur montrera les preuves de leur automystifications, ils seront nombreux à refuser de les regarder. La matérialité des faits dut se soumettre à la vérité transcendantale du communisme. De fait l’illusion communiste dans laquelle tombèrent tant d’écrivains, d’artistes et de savants a eu sa première acmé sous la menace qu’Hitler faisait peser sur le monde. Les années passant, la faiblesse même des démocrates devant les agressions nazies joua en faveur du communisme, rempart ultime contre la « bête immonde ». 

 

Chapitre 25. Drieu la Rochelle et la tentation fasciste. 

 

En 1934Pierre Drieu la Rochelle se rend à Berlin en compagnie d’une délégation du Comité d’entente des jeunesses pour le rapprochement franco-allemand, conduite par Bertrand de Jouvenel. De retour en France, il fait scandale dans les milieux de gauche en montrant la ferveur joyeuse de la jeunesse allemande et en publiant un article « Mesure de l’Allemagne » où il présente le régime national socialiste en adversaire résolu du capitalisme. 

 

Jusqu’au 6 février 1934, il n’avait pas encore opté pour le fascisme. Pour Drieu, il a donc existé en France avant la guerre, une sorte de pré fascisme intellectuel qui était la rencontre d’un élément de droite (le nationalisme) et d’un élément de gauche (le socialisme). Il sympathise avec les théories de ses cadets, non-conformistes, antimarxistes, qui veulent « combiner l’individualisme et le socialisme dans une synthèse mobile », mais il leur reproche leur inconséquence. A cette époque Drieu est un romancier sans succès, auteur de théâtre sans renommée, essayiste peu reconnu qui traîne une vie de mondain nonchalant et fauché, aimé de femmes généreuses et peu rancunières. Il est intéressé par la politique moins pour les idées, qu’il affectionne pourtant, que pour les rencontre qu’elle suscite et les émotions qu’elle procure. 

 

« Le 6 février 1934 a pour Drieu l’effet dune catalyse. Il a vu de ses yeux ce qu’il souhaite depuis longtemps : la rencontre des membres sains de la nation qui, venant de droite et venant de gauche, ou ni de droite ni de gauche, ont marché ensemble contre la décrépitude du capitalisme parlementaire, à la recherche d’une force nouvelle, nourrie de ce que la gauche et la droite ont de meilleur. Désormais il assume ses idées. Il est fasciste. Son fascisme idéal est nationaliste plus socialiste. »

 

Cette conversion fasciste de Drieu trouve son aboutissement en juin 1936 quand Jacques Doriot fonde le Parti du Peuple Français (PPF) à Saint Denis. 

 

L’histoire de Doriot est celle d’une désillusion personnelle, celle d’un militant communiste valeureux qui se voit préférer par les hautes sphères des rivaux plus alignés, plus dociles, moins fracassants. Après le 6 février, sans demander la permission à la direction du Parti, il met sur pied à Saint Denis, un comité anti fasciste qui réalise un pré front populaire à l’échelle municipale. Refusant de se rendre à une convocation à Moscou, il est exclu par l’Internationale communiste peu de temps avant la signature de l’alliance politique entre communistes et socialistes, qu’il avait voulue trop tôt. 

 

Le choix de Drieu pour le PPF est un moyen pour lui d’abattre le communisme. 

 

En 1936, avec l’arrivée au pouvoir de Léon BlumDrieu verse dans l’antisémitisme. Le juif concentre désormais en sa personne l’intégralité de ce qui lui fait horreur et que résume le mot décadence. 

 

Le charme de Doriot cessera de s’exercer sur Drieu et les autres intellectuels au cours de l’année 1938. Mais il ne changera plus de camp. 

 

Chapitre 26. Vigilance antifasciste.

 

Après le 6 février 1934, ce sont des intellectuels qui prennent l’initiative d’un front de défense antifasciste sans exclusive. Le 10 février une trentaine d’entre eux (dont A Malraux, A Breton, P Eluard, J Guéhenno …) signent une pétition en faveur d’une « unité d’action de la classe ouvrière » pour « barrer la route au fascisme. » En mars 1934 est fondé le Comité de vigilance des intellectuels antifascistes (CVIA) sur l’initiative de Pierre Gérôme.

 

La signature du pacte d’unité d’action entre socialistes et communistes le 27 juillet 1934 éclaircit la situation. Mais dans l’esprit de Staline, toutes les actions qui sont entreprises ont pour but de défendre l’intégrité du territoire soviétique, de sauver la révolution prolétarienne, la patrie du communisme, contre toute offensive du camp impérialiste. En France le Front populaire est solennellement constitué le 14 juillet 1935. Ce jour là, ceux qui ont contribué à la mise sur pied du CVIA peuvent estimer avoir contribué à ce rassemblement. Mais déjà des tendances et des divergences se font jour. 

 

- Les antifascistes extérieurs qui sont dominés par les communistes sont avant tout soucieux du danger de guerre que représente l’Allemagne nazie. Ils ont l’appui de l’Internationale communiste et de sa filiale, le Comité d’Amsterdam Pleyel dont le but primordial est la défense de l’URSS. 

 

- Les antifascistes intérieurs sont avant tout des pacifistes. Pour eux les risques de guerre ne proviennent pas de l’extérieur, mais de l’intérieur. Pour Alain et ses disciples l’antifascisme ne peut être la justification d’aucune guerre. 

 

- Les antifascistes révolutionnaires pensent que le fascisme ne peut être vaincu que par la révolution prolétarienne. Ceux là n’acceptent pas l’alliance avec les Radicaux. André Breton est assez proche de cette ligne. 

 

La signature du pacte franco soviétique de mai 1935 et la déclaration de Staline comprenant et approuvant « pleinement la politique de défense nationale faite par la France » provoque la formation d’un comité de liaison contre la guerre et l’union sacrée (dont Giono et Simone Weil). Au sein du CVIA des dissensions sont de plus en plus vives et une ligne de démarcation sépare de plus en plus nettement les partisans de la fermeté face à l’Allemagne et les défenseurs du compromis avec Hitler. Le CVIA éclate au lendemain de la victoire du Front populaire. Les antifascistes extérieurs avec Paul Langevin quittent un comité qui sera de plus en plus en plus dominé par les pacifistes intégraux. Paul Langevin et ses disciples, sous la tutelle de Romain Rollandformeront le « Comité mondial de lutte contre la guerre et le fascisme. »

 

En 1983, faisant le bilan du CVIA, Pierre Gérôme confessera son impuissance. « C’est l’histoire d’un désastre. Nous nous étions réunis pour combattre le fascisme et la guerre et nous avons eu les deux avec la défaite en prime. » 

 

Chapitre 27. Le congrès des écrivains de 1935.

 

Ce congrès est créé par Willi Munzemberg propagandiste du Kominterm. Les interventions seront structurées autour de Gide et de Malraux.

 

Avant de se séparer les participants à ce congrès décident la poursuite de leur action par la fondation d’une « Association internationale des écrivains pour la défense de la culture » à la tête de laquelle est placé un bureau permanent de 112 membres, couronné par un présidium de 12 membres (Barbusse, Romain Rolland, A Gide, H Mann, T Mann, M Gorki, E Forster, A Huxley, B Shaw, Sinclair Lewis, S Lagerlöf et Ramon Del Valle-Inclán).

L’opération est réussie. L’internationale de la pensée se solidarise avec l’URSS face à la menace des fascismes.

 

Mais c’est durant ce congrès qu’est ébruitée l’affaire Victor Serge. Ancien militant anarchiste, écrivain belge de langue française il avait fait de la prison en France puis s’était établi en URSS. En 1933, il est arrêté en envoyé sans jugement dans un camp à Orenbourg pour menées contre-révolutionnaire. Son seul tort était de s’être exprimé en écrivain communiste croyant encore en la liberté d’expression. L’intervention de Madeleine Paz au congrès permet de faire connaître cette affaire. André Gide qui au début fait confiance au pouvoir soviétique commence alors son revirement comprenant « que le congrès était entièrement manœuvré avec une parfaite mauvaise foi par les agents du Parti communiste. » L’affaire Serge connaîtra une fin heureuse. Après les interventions de Gide et de Romain Rolland, Victor Serge est autorisé à quitter l’URSS (il arrive à Bruxelles le 17 avril 1936).

 

Le congrès des écrivains a une autre conséquence. La rupture définitive entre les surréalistes et le PC. Les surréalistes se démarquent catégoriquement du régime soviétique tel qu’il est alors. Quand en 1936 seront connus les procès de Moscou, Breton et les surréalistes se montreront les plus actifs dans leur dénonciation. 

 

Le 30 août 1935, décès à Moscou, d’Henri Barbusse. Avec lui les communistes perdent un de leurs plus fidèles propagandistes. 

 

Chapitre 28. Sur le front éthiopien. 

 

L’année 1935 devient le théâtre d’un affrontement entre intellectuels qui n’avaient jamais été aussi tranché depuis l’affaire Dreyfus. La crise éthiopienne en est l’origine. 

 

Le 22 septembre 1935Maurras, le premier, publie un article dans l’Action française dans lequel il traite d’assassins les 140 parlementaires français qui ont signé un manifeste hostile à l’expédition italienne. 

 

Le 4 octobrele Temps publie un manifeste pour la défense de l’occident qui s’insurge contre les risques de guerre que pourraient provoquer des rétorsions contre l’Italie. Il défend également la légitimité d’une œuvre colonisatrice dans un pays dont l’indépendance n’est qu’un « amalgame de tribus incultes », «  un des pays les plus arriérés du monde ». D’esprit colonialiste ce texte se donne pour objectif immédiat de peser sur les décisions que va prendre le gouvernement Laval. Il offre comme avantage secondaire de répertorier tous les intellectuels français qui résolument hostiles au Front populaire peuvent constituer la réplique d’un comité de vigilance de droite. 

 

A gauche sur l’initiative de Jules Romain et de Louis Aragon un contre manifeste est publié le lendemain dans l’œuvre. Les signataires s’étonnent de « trouver sous des plumes françaises l’affirmation de l’inégalité en droit des races humaines, idée si contraire à notre tradition…. ». Ils défendent la SDN et engagent le gouvernement à se « joindre aux efforts de tous les gouvernements qui luttent pour la paix et pour le respect de la loi internationale. »

 

Mais de nombreux intellectuels catholiques refusent de se laisser engager derrière le manifeste de droite. Le 17 octobre les journaux catholiques « L’Aube », « la vie catholique » et « sept » publient un troisième manifeste « Manifeste pour la justice et la paix. » dans lequel ils rappellent l’impératif de la justice et refusent d’approuver Mussolini et soulignent la nécessité d’affirmer cette volonté de justice et de paix par l’intermédiaire de « l’organisme de Genève. »

 

Par contre une question n’obtient pas de réponse. Quelle attitude faut-il avoir face au fascisme international, quand la volonté d’arrêter son expansion implique un risque de guerre ? Aucun des 3 manifestes ne brille par la lucidité. 

 

Chapitre 29. Vendredi.

 

La presse des années trente est dominée par les journaux de droite ou d’extrême droite :

Gringoire : 350.000 exemplaires.

Candide : 250.000 exemplaires.

Je suis partout (hebdomadaire) : 100.000 exemplaires.

 

Pour concurrencer ces hebdomadaires, Gaston Gallimard décide de réagir et demande à Emmanuel Berl de lancer Marianne en 1932. Ce sera un journal républicain très ouvert, mais avant tout de gauche (il plafonnera à 120.000 exemplaires). 

 

En 1935André Chamson est à l’origine d’un nouvel hebdomadaire : « Vendredi » qui s’annonce comme le journal des écrivains favorables au Front populaire : Jean Guéhenno, Andrée Viollis (Andrée Jacquet de la Verryere qui passe pour l’une des femmes les plus remarquables de son temps) rejoignent André Chamson. Le rédacteur en chef est un catholique de gauche Louis Martin-Chauffier. De novembre 1935 à juillet 1936, cet hebdomadaire offre un portrait imperturbable de la gauche unie, en marche vers la victoire électorale d’avril-mai 1936. Le ciment idéologique en est l’antifascisme et la volonté de fonder une société plus humaine. C’est la guerre d’Espagne qui va créer les premières tensions au sein de l’équipe. Vendredi est unanime pour condamner la rébellion et défendre la République, mais l’équipe s’oppose sur l’attitude à adopter. Jean Guéhenno est hostile çà l’intervention alors que les autres sont pour. 

 

Vendredi, à force de vouloir présenter un front uni de la gauche esquive le plus souvent le débat se contentant de juxtaposer des points de vue sans ligne directrice. Après la désunion du Front populaire, Vendredi connaît à son tour la désunion. Son agonie est achevée en novembre 1938 au lendemain de la conférence de Munich, qui consomme la désunion de la gauche et l’impossibilité d’une conciliation entre les pacifistes et ceux qu’on appelle, malgré eux, les bellicistes. 

 

Chapitre 30. Malraux en Espagne. 

 

La guerre d’Espagne, plus encore que l’agression italienne en Ethiopie, provoque en France, une lutte ouverte entre les partisans du général Franco et les défenseurs du gouvernement légal. Les Français vivent alors pendant 3 ans une sorte de guerre civile par Espagnols interposés. Dès le premier jour du conflit, André Malraux est décidé non seulement à parler en faveur de la République espagnole, mais à agir. D’emblée il conçoit la lutte contre le fascisme à l’échelle internationale, militant au sein de l’Association internationale pour la défense de la culture et présidant en 1936 le comité mondial contre la guerre et le fascisme. Malraux va devenir un agent parallèle d’une aide française la plus discrète possible, dont les partisans sont notamment Léo Lagrange, sous secrétaire d’Etat aux sports et aux loisirs et Pierre Cot, ministre de l’air. Le gouvernement français fournit une soixantaine d’appareils entre le 25 juillet et 9 août 1936.

 

Avec l’escadrille Espana formée à Barajas, Malraux s’engage dans l’opération de Medelin qui assure la sauvegarde de Madrid en barrant la route à la colonne du général Asencio. L’escadrille Espana qui ensuite se fixe à La Senera au sud de Valence prendra en novembre le nom d’escadrille André Malraux. L’activité de cette escadrille va durer du 10 août 1936 au 11 février 1937. Son bilan militaire bien que modeste n’est pas dérisoire, mais surtout le plus important est la création d’un mythe, celui de l’intellectuel en arme au service de l’anti fascisme. « L’espoir » qui sortira de cette expérience est le roman et le poème de la fraternité. A la fin de février 1937, Malraux part pour les USA où il entreprend une tournée de conférences en faveur des Républicains. 

 

Malraux a été convaincu dans les années trente et davantage encore à partir de la prise de pouvoir par Hitleren 1933, du caractère inévitable de la lutte contre le fascisme, qui est à ses yeux le mal absolu. S’il s’engage peu auprès de Léon Blum c’est qu’il sent l’aveuglement et l’impuissance du Front populaire face aux dictatures. Dès lors Malraux a choisi son camp, celui de l’URSS. La guerre d’Espagne lui confirme que les communistes sont les seuls à disposer de la discipline et de la force nécessaires à combattre le fascisme. Sa pente naturelle le porte plutôt vers Durutti, le chef du Front libertaire de l’Aragon et de l’anarchisme, mais il se refuse à être un héros de cause désespérée. L’espoir passe par l’efficacité, mot clé chez lui. Après la guerre, en raison de son ralliement au RPF du général de GaulleMalraux est suspecté de suivre « un itinéraire classique de l’enthousiasme révolutionnaire à l’amertume réactionnaire. » En fait aux yeux de Malraux, l’ennemi avait changé de nom. Il n’y avait plus de menace fasciste. Le danger, c’était désormais le totalitarisme qui s’installait en Europe au nom de la Révolution. 

 

Chapitre 31. André Gide au pays des soviets. 

 

Gide quitte la France le 16 juin 1936 pour un voyage de 9 semaines en URSS (Moscou, Leningrad, le Caucase (Tiflis), la mer Noire). C’est un voyage organisé et étroitement contrôlé par le gouvernement soviétique avec réception des personnalités éminentes, propagande, hospitalité de luxe et camouflage des réalités quotidiennes. Mais le voyage est gâté par la maladie et la mort de son ami Eugène Dabit le 21 août.De retour à Moscou, Gide tombe en plein procès des « seize » le premier des procès de Moscou (Zinoviev et Kamenev seront condamnés à mort à l’issue de ce procès). 

 

De retour à Paris, il décide de narrer son voyage et son « effroyable désarroi ». Malgré tous les arguments avancés par ses amis et notamment Aragon, « le retour d’URSS » est mis en vente le 13 novembre 1936. Ce livre connaîtra 9 tirages (150.000 exemplaires) jusqu’en septembre 1937 et sera traduit en 15 langues. Deux éléments expliquent le succès et la force de ce livre. 

- Il s’agit d’un témoignage à la fois critique et dépourvu de hargne d’autant plus efficace que l’auteur parle de son « amour » pour l’URSS. 

- Ce livre a pour auteur le plus grand écrivain français vivant. 

 

Le retour d’URSS n’est pas un pamphlet. On y vante beaucoup de réalisations du régime, mais de chapitres en chapitres s’accumulent tous les attributs, ou presque, de la société totalitaire. Condamné par les communistes, Gide s’attire en revanche l’approbation de nombreuses personnalités de la gauche non communiste et des trotskistes. Emmanuel BerlJean Giono, Victor Serge et beaucoup d’autres félicitent Gide de son « dégonflage impitoyable du bluff stalinien. » 

 

Chapitre 32. Les grands cimetières sous la lune. 

 

Bernanos comme Gide se flatte de faire de la politique avec son cœur, avec des sentiments et aussi avec la morale. Lorsqu’éclate la guerre d’Espagne, il est à Palmas de Majorque depuis octobre 1934. Le coup de force d’Antonio Primo de Rivera le 17 juillet 1936 l’enthousiasme. Mais insensiblement Bernanos va, non pas changer de camp, mais témoigner de ce qu’il voit. La sauvagerie de la répression nationaliste l’écœure. Le 27 mars 1937, il quitte les Baléares et commence la rédaction de ce qui sera « Les grands cimetières sous la lune », livre qui paraît en avril 1938. 

 

Mauriac comme Bernanos ne peut plus supporter que christianisme et fascisme se confondent. Mais cette évolution n’est pas représentative de celles des catholiques en général (Paul Claudel, Gaëtan Bernoville). Le pape Pie XII lui-même salue la fin de la guerre civile par un télégramme à Franco « élevant notre âme vers Dieu, nous le remercions sincèrement avec votre Excellence pour la victoire de l’Espagne catholique. »

 

Jacques Maritain pour sa part participe activement au débat et à la défense du peuple basque. Président du « Comité pour la paix civile et religieuse en Espagne », il ne cesse de dénoncer les prétentions religieuses de l’insurrection franquiste. 

 

Mounier et les collaborateurs catholiques d’Esprit sont parmi les premiers à dénoncer la collusion de l’Eglise hiérarchique avec la réaction et le « désordre établi ».

 

« La publication des grands cimetières sous la lune consomme la rupture de Bernanos avec la droite d’Action française. Ce livre révèle un imaginaire bernanosien historiquement douteux, poétiquement sublime, empreint d’un christianisme à la fois évangélique et chevaleresque, dont une des vertus cardinales est le sens de l’honneur. Adversaire de la démocratie, il ne supporte pas dans les suites de la guerre civile, l’imposture d’une prétendue « croisade » dont les moyens ordinaires s’appellent la terreur blanche. Ce livre est aussi un pamphlet contre la droite française, celle qu’inspire Maurras tout particulièrement. »

 

Bernanos alarme ses contemporains sur la montée des totalitarismes, le communisme et le fascisme, mais aussi le totalitarisme mou des démocraties capitalistes. 

 

Chapitre 33. Martin du Gard, prix Nobel. 

 

Le 11 novembre 1937Roger Martin du Gard obtient le prix Nobel de littérature. Le 10 décembre en présence du roi de Suède, dans son discours de remerciement qui se veut délibérément politique, il donne un sens clair à son dernier ouvrage « L’été 1914 ». « Au cours de ces 3 volumes j’ai essayé de ressusciter l’atmosphère angoissée de l’Europe, à la veille des mobilisations de 1914, j’ai essayé de montrer la faiblesse des gouvernements d’alors, leurs hésitations, leurs imprudences, leurs appétits inavoués : j’ai essayé surtout de rendre sensible la stupéfiante inertie des masses pacifiques devant l’approche de ce cataclysme dont celles allaient être les victimes, et qui devaient laisser derrière lui neuf millions d’hommes morts, dix millions d’hommes mutilés. »

 

Alors qu’en 1929, dans son pamphlet sur « la mort de la pensée bourgeoise », Emmanuel Berl déplorait que la littérature française de l’époque fut extraordinairement conformiste, il n’en est plus de même quelques années plus tard. Le nouvel état du monde conduit de nombreux écrivains à devenir moins psychologue et plus sociologue, moins exotique et plus politique. 

« Les conquérants » de Malraux.

«  L’été 1914 » de Roger Martin du Gard.

«  Les hommes de bonne volonté » de Jules Romain, dont les 27 volumes entendent reconstituer une histoire totale, décrivant les diverses couches sociales à travers plusieurs dizaines de destinées. 

« Les cloches de Bâle, les veaux quartiers » d’Aragon.

 

Désormais les barrières sociales éclatent et la littérature entend dépeindre le peuple.

« Hôtel du Nord » d’Eugène Dabit

«  Les frères Bouquinquant » de Jean Prévost

« Le monde paysan » de Jean Giono.

« Le sang noir » de Louis Guilloux qui revient sur les horreurs de la guerre. 

 

Le véritable coup de tonnerre qui frappe d’obsolescence le pamphlet d’Emmanuel Berl est le premier roman de Céline « Voyage au bout de la nuit. » prix Renaudot 1932. Révolutionnant le langage écrit, bouleversant tous les conformismes, Céline dans un récit hallucinatoire, grinçant, rabelaisien, faisait évoluer son héros Bardamu dans toutes les fanges de la société moderne. 

 

Lors de la crise des Sudètes, Martin du Gard publie une déclaration pacifiste qu’il regrette aussitôt. A la veille de la Conférence de Munich, il ne manque pas de lucidité et s’attend à une reculade de la France et de l’Angleterre. Mais il ne veut pas concevoir que si l’Europe est à deux doigts de la guerre, c’est sans doute aussi parce que les pacifistes comme lui, depuis l’arrivée d’Hitler au pouvoir se sont prêtés à toutes les reculades. Roger Martin du Gard ou la lucidité et ses limites. 

 

Chapitre 34. L’équinoxe de septembre. 

 

Avec l’affaire des Sudètes les intellectuels de gauche se divisent une fois de plus. Certains demandent des mesures énergiques pour sauver la Tchécoslovaquie (Romain Rolland, Paul Langevin, Francis Jourdain) alors que d’autres sont prêts à un compromis pour sauver la paix (Alain, Jean Giono, Victor Margueritte).

 

Jean Giono, qui est devenu un militant pacifiste intégral, milite pour un désarmement unilatéral. En 1936 il rompt avec les partis de gauche. Quand à Alain il reste un pacifiste invétéré. Son postulat : s’armer, c’est exciter l’ennemi.

 

Les pacifistes pensent qu’Hitler répare l’injustice du traité de Versailles. Quand tous les Allemands seront réunis à l’Allemagne, la paix sera enfin rétablie. Autre raison qui encourage l’esprit de capitulation chez certains intellectuels de gauche. Leur antistalinisme, plutôt que de choisir entre les crimes de Staline et les crimes d’Hitler, ils préfèrent s’abstenir profitant ainsi au camp munichois. 

 

Le pôle principal de résistance à la capitulation munichoise se situe du côté des communistes qui reçoivent l’appui d’Henry de Montherlant qui devient célèbre en publiant « Les jeunes filles. » (1936). Politiquement il estime qu’il ne faut pas s’agenouiller devant Hitler.

 

Chez les jeunes intellectuels, Sartre est spectateur, mais fortement marqué par la crise de Munich. Raymond Aron s’alarme des reculades face à Hitler, il est antimunichois. Emmanuel Mounier jusque là pacifiste bascule lui aussi dans le camp des anti munichois. 

 

A droite François Mauriac est munichois en pensant à ses fils et Bernanos profondément antimunichois. 

 

Chapitre 35. La Droite au couteau de cuisine. 

 

A droite l’Action française affirme elle aussi un « ninisme » (ni Hitler, ni Staline) symétrique à la gauche pour aboutir à la même conclusion : laisser les mains libres à l’Allemagne nazie. Par contre elle est favorable au réarmement à la condition que celui-ci s’accomplisse dans le cadre d’un régime de son choix.

 

1937 et 1938 constituent pour Charles Maurras ses années d’apothéose. Il réunit des foules importantes lors de ses meetings et entre à l’académie française le 10 juin 1939.

 

Mais le journal de Maurras est dépassé sur sa droite par un journal encore plus violent « Je suis partout », auquel collaborent sous la direction de Pierre Gaxotte, Lucien Rebatet, P A Cousteau, Georges Blond, Claude Roy, Robert Brasillach. Ils ne cachent pas leur estime pour le régime hitlérien. Ce n’est pas un modèle politique, mais un modèle d’énergie, l’exemple d’une nation qui s’est redressée selon les ressorts de son propre génie. 

 

D’autres publications d’extrême droite participent à cet esprit munichois : Candide (Pierre Gaxotte), Gringoire (Henri Béraud), Combat (Jean de Fabrègues et Thierry Moulnier).

 

Drieu la Rochelle échappe à « l’esprit de Munich » sans doute parce que la lâcheté nationale insulte son sens ou sa nostalgie de l’héroïsme. Par contre il est de plus en plus antisémite. Dans la France des années trente, l’antisémitisme jouit d’un statut respectable, ressort d’une tradition culturelle et politique qui a ses entrées à l’Académie. Il fait partie des passions banales. 

 

Chapitre 36. La grande culbute. 

 

Dans les semaines qui précèdent la guerre, le gouvernement Daladier nomme Jean Giraudoux commissaire général à l’information. Celui-ci passe pour un des plus brillants écrivains français, surtout grâce à son théâtre. Il mène d’ailleurs une double carrière de diplomate et d’écrivain. On le croyait radical socialiste, libéral de gauche, on le découvre sous les traits d’un patriote xénophobe. Pénétré de la grandeur, de la supériorité de la civilisation française, il déplore la dénatalité et l’arrivée en masse d’étrangers. Les Juifs venus d’Europe centrale et orientale sont nettement visés. 

 

La signature du pacte germano soviétique provoque un grand choc dans le parti communiste. Des députés démissionnent, des militants déchirent leur cart. Aragon soutient la signature du pacte, pour Georges Cogniot et Laurent Casanova, Staline a toujours raison. 

Mais Paul Langevin et le couple Joliot-Curie signent un manifeste contre la volte face soviétique. Mais après quelque temps de perplexité, le parti est repris en main par le komintern et réaligné sur le mot d’ordre « contre la guerre impérialiste » expression pour désigner les démocraties libérales comme les vraies ennemies. 

 

Paul Nizan et Georges Friedmann quittent le parti communiste à leur tour, ne pouvant supporter l’agression de la Pologne par l’URSS (après l’Allemagne). Nizan sera tué dans la poche de Dunkerque le 23 mai 1940. Auparavant il avait été Sali par Aragon et surtout Maurice Thorez qui avait déserté pour rejoindre l’URSS. 

 

Le choc de juin 1940 a l’effet d’un séisme moral et peu d’intellectuels réagissent comme Edmond Michelet, courtier à Brive, qui diffuse un tract où on lit « en temps de guerre, celui qui ne se rend pas à toujours raison sur celui qui se rend. »

 

A Paris le ton dominant est donné par l’ancienne presse munichoise. Roland Dorgelès règle ses comptes dans Gringoire avec les hommes du Front populaire : « D’une exposition ratée (celle de 1937) à une guerre perdue, voilà le chemin qu’ils vous ont fait prendre. »

 

Chapitre 37. Que faire ? Le cas Mounier. 

 

Malraux qui était réformé s’engage. Il est incorporé dans une unité de chars. Il est fait prisonnier le 16 juinmais réussit à s’évader en compagnie de l’abbé Magnet futur aumônier du Vercors. Il rejoint sa maîtresse à Hyères où il se place dans une position d’attente. Après novembre 1942, il quitte la Côte d’Azur pour la Corrèze. Il entre dans la Résistance fin mars 1944 après l’arrestation de son frère. 

 

Raymond Aron fait la guerre dans un service météorologique. La débâcle l’entraîne à Bordeaux où il embarque pour l’Angleterre. Il est versé dans une compagnie de chars des FFL avant de rejoindre André Labarthe qui vient de fonder une revue « La France Libre ». Il s’efforce d’y garder le point de vue le plus objectif possible sur le déroulement de la guerre. 

 

Mounier (directeur de la revue « Esprit ») se replie à Lyon où il entend sauvegarder les valeurs de l‘esprit. Il estime que le régime de Vichy n’est pas un régime totalitaire mais seulement autoritaire où l’on peut encore « trouver la place de la liberté ». Sans œuvrer explicitement au programme de la Révolution nationale il va s’employer à travailler et à s’exprimer dans ce cadre. Sa philosophie de l’engagement lui dicte une attitude : la politique de « présence », l’occupation du « terrain » et si possible un parasitage de ma Révolution nationale par ses amis et ses idées. Dès novembre 1940, il fait reparaître Esprit (10 numéros jusqu’en août 1941). Pour déjouer la censure, il utilise des clauses de style pour faire passer des messages que les lecteurs comprendront à demi mot. Parallèlement il fait des conférences, écrit des articles et place ses amis autant qu’il peut dans des associations de jeunesse. 

 

A la fin de janvier 1941, il est sollicité pour faire partie d’un mouvement culturel « Jeune France » qui a pour but de regrouper les artistes habitants ou réfugiés en zone non occupée. Il en profite pour y placer ses partisans. Mais l’expérience ne dure que quelques mois. Son action souterraine est très vite dénoncée et il commence à attirer l’attention du ministère de l’Intérieur (sous l’impulsion de Jean de Fabrègues membres de l’Action française). 

 

Le 15 janvier 1942, Mounier est arrêté à Lyon pour complicité avec les activités du mouvement de résistance « combat ». Il est jugé en octobre 1942 et malgré des présomptions de culpabilité, il est relaxé au bénéfice du doute. Il se retire alors dans la Drome, mais la revue Esprit renaît dès décembre 1944.

 

Chapitre 38. La « divine surprise » de Charles Maurras. 

 

L’Action française se révélera un des plus fidèles soutiens au Maréchal Pétain. Elle se fixera pour but « d’empêcher à tout prix, au cours de cette crise vitale, qu’il y ait le moindre désaccord entre l’action du Maréchal et l’opinion du pays ». Le mouvement se raccroche à Pétain et n’admet d’autre collaboration avec l’Allemagne que la collaboration gouvernementale. 

 

Par contre « Je suis partout » toujours dirigé par Brasillach devient le grand organe français de la collaboration. Il atteindra un tirage de 300.000 exemplaires. 

 

La Révolution nationale voulue par Pétain a-t-elle été la révolution maurrassienne ? «  Il a existé une diffusion, une infusion, une imprégnation du maurrassisme sous le nouveau régime officiel, mais sans préjudice des autres influences qui ont fait de la Révolution nationale un syncrétisme de la réaction conservatrice, plutôt que l’application pure et simple d’une doctrine déjà élaborée. D’une manière générale, le style du nouveau régime, moralisateur, paternaliste, nataliste, clérical, s’accorde bien avec la pensée plus conservatrice que révolutionnaire de Charles Maurras. Et durant toute l’occupation l’Action française dénoncera sans relâche les ennemis de la Révolution nationale : gaullistes, juifs, communistes, francs maçons métèques, mais aussi catholiques libéraux (ceux qui choisissent la Résistance contre Vichy) » 

 

Dans un souci d’ordre, lui qui était antigermanique, en arrive à soutenir l’occupant allemand qui tente d’empêcher la libération du territoire. Mais nombre de ses disciples refusent cette logique et changent de camp : Henri d’Astier de la VigeriePierre Guillain de BenouvilleHonoré d’Estiennes d’OrvesClaude Roy (qui se converti au communisme). 

 

Maurras est arrêté à Lyon le 8 septembre 1944. Son procès se déroule du 24 au 27 janvier 1945. Il est condamné à la dégradation nationale et à la détention à vie. En apprenant la sentence il déclare « C’est la revanche de l’affaire Dreyfus. » Il meurt le 6 novembre 1952.

 

Chapitre 39. La NRF sous la botte. 

 

Après la défaite Pierre Drieu la Rochelle devient directeur de la NRF à la place de Jean Paulhan qui reste chez Gallimard pour s’occuper de la bibliothèque La Pléiade. Il est arrêté en mai 1941 et malgré ses aveux (d’avoir abrité une ronéo du musée de l’Homme), il est relâché sur une intervention de Drieu la Rochelle.

 

A Paris le service du livre de la Propaganda Staffel est confié à Gerhard Heller francophile convaincu. Il est favorable à la réapparition de la NRF ce qui est fait le 1er décembre 1940. De nombreux auteurs, parfois peu disposés à collaborer voire résistants vont publier leurs textes dans la revue à côté de ceux d’auteurs ouvertement collaborateurs voire fascistes. 

 

Eugène Guillevic futur résistant communiste explique cet état d’esprit « A l’époque je croyais que la poésie se situait au dessus ou à l’écart des contingences, des circonstances, ou mieux, que sa force révolutionnaire agissait par elle-même où que paraisse le texte. »

 

Drieu pour sa part reproche aux Allemands de n’avoir pas cru eux-mêmes aux rares éléments fascistes qu’il y avait en France ; A Hitler de n’avoir pas su établir un véritable socialisme sur les territoires qu’il avait soumis. Dès novembre 1942, il juge que la défaite allemande est de plus en plus certaine. L’idée du suicide commence à l’envahir. La NRF l’intéresse de moins en moins. Une première tentative échoue le 11 août 1944, la deuxième réussit le 16 mars 1945.

 

Pierre Drieu la Rochelle et sa vie ont beaucoup fasciné, mais à ses propres yeux, il est un raté. Il n’a pas été le grand doctrinaire des temps nouveaux. Il n’a pas été l’écrivain et surtout le romancier qu’il rêvait d’être. Il s’est fourvoyé en politique, passant de l’esprit de Genève au fascisme, avant l’ultime séduction du communisme soviétique auquel il ne peut adhérer. Mais il ne juge pas s’être déshonoré par son racisme qui reste sa conviction la plus indéracinable. Le « charme de Drieu à longtemps masqué ou minimisé cette dimension funèbre de sa personnalité et de son œuvre. Gilles est un des romans les plus antisémites du patrimoine français. 

 

Chapitre 40. Les écrivains de la nuit.

 

Après l’armistice de juin 1940, la ligne officielle du PC reste dans le sillage du pacte germano soviétique. La direction officielle du PC n’entrera dans la résistance qu’avec l’invasion de l’URSS par l’Allemagne. Pourtant quelques uns s’engagent dans la résistance dès le début : Charles TillonAuguste Havez, Georges Guingouin.

 

A Paris AragonGeorges PolitzerDanielle CasanovaJacques Decour vont créer un hebdomadaire « Les lettres françaises » qui regroupe les écrivains de la résistance de la zone Nord. Le premier numéro doit sortir lorsqu’en février 1942 l’arrestation de Jacques Decour fait échouer le projet. Il faut attendre septembre 1942pour que sorte réellement le premier numéro. Il publie le manifeste du Front national des écrivains qui se termine ainsi. « Les lettres françaises sera notre instrument de combat et par sa publication, nous entendons nous intégrer à notre place d’écrivains dans la lutte à mort engagée par la Nation française pour se délivrer des oppresseurs. »

 

 Jean Paulhan est aussi un intermédiaire entre les écrivains et les Editions de minuit fondées à l’automne 1941 par Jean Bruller (Vercors) et Pierre Lescure. Elles publieront durant l’occupation 25 titres sous pseudonymes : Mauriac, Aragon, Jean Guéhenno, Jean CassouFrançois Mauriac sera l’unique académicien du Comité national des écrivains jusqu’en 1944. Il est d’ailleurs une des cibles privilégiées des écrivains collaborateurs (Brasillach, Rebatet).

 

Durant cette période, la Suisse va constituer pour de nombreux écrivains français un espace de liberté. Albert Béguin professeur de littérature française à l’université de Bâle créé « Les cahiers du Rhône ». Il s’agissait d’une série de livres qui furent publiés en Suisse à partir de 1941. Béguin converti au catholicisme entendait prendre la relève des publications françaises interdites : Esprit, Temps nouveaux. 

 

La France Libre voit la naissance d’un nouvel écrivain, Romain Gary qui a rejoint l’Angleterre dès juillet 1940.Navigateur bombardier du groupe Lorraine, héros de la guerre, futur compagnon de la Libération, Romain Gary écrivit pendant les années de guerre son premier roman : « Education européenne. »

 

De l’autre côté de l’Atlantique, des écrivains aidèrent la résistance intellectuelle et spirituelle de la France : Jacques Maritain, André Breton, Jules Supervielle, Antoine de Saint Exupéry, Georges Bernanos.

 

Chapitre 41. Pardon et châtiment.

 

Après la Libération commence l’épuration :

 

23 octobre 1944, début du procès de Suarez, directeur politique du quotidien collaborationniste « Aujourd’hui ». Il est condamné à mort et exécuté.

 

29 décembre 1944. Début du procès d’Henri Béraud, éditorialiste de « Gringoire » spécialisé dans une anglophobie passionnelle, obsessionnelle, délirante. Condamné à mort, il est gracié par le général De Gaulle.

 

A Paris, depuis la Libération, dans la presse, deux voix dominent : François Mauriac au Figaro et Albert Camus à Combat.

 

Mauriac prône le pardon « pour dissiper cette atmosphère de haine, de délation, de vengeance qui entretien une fausse justice. ». Il est soutenu par Jean Paulhan qui plaide pour le « droit à l’erreur des écrivains ».

 

Camus à l’ opposé veut « une justice prompte et limitée dans le temps, la répression immédiate des crimes les plus évidents et ensuite, puisqu’on ne peut rien faire sans la médiocrité, l’oubli raisonné des erreurs que tant de Français ont tout de même commises. »

 

 

Le 19 janvier 1945 s’ouvre le procès de Robert Brasillach. La délibération du jury pour le condamner à mort ne dure que 20 mm. Le général De Gaulle refuse sa grâce et il est exécuté le 6 février 1945. Le cas Brasillach émeut et provoque un clivage entre ceux qui estiment que c’est une injustice du moment où les écrivains étaient jugés plus coupables que les hommes d’affaires et les politiciens, d’autre au contraire mettaient en avant la responsabilité des intellectuels. 

 

« Au-delà de la division que répertorient les listes noires du CNE, entre « résistants » et « collabos », un autre clivage se dessine à travers les controverses de l’épuration. Les tenants de la « littérature pure », dont Jean Paulhan se fait le champion, et qui veulent préserver la création littéraire du châtiment politique (ou limiter celui ci), s’opposent aux défenseurs d’une « littérature engagée » dont Jean Paul Sartre fait la théorie et qui exigent des prosateurs une ultra responsabilité politique y compris dans leurs silences. »

 

Fin de la 2e partie. 

 

 



23/04/2012
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